Résumé de la 280e partie n Tandis que la voiture démarrait sur les chapeaux de roue, Charlotte jeta un coup d'œil à Jonathan… S'il ne tenait qu'à moi... s'excusa mon propriétaire. Vous savez, certains de mes meilleurs amis sont chinois. Mais les voisins se plaignent. Ils ont peur d'être pris pour cible à leur tour. — Nous allons déménager, monsieur Klein, dis-je. Ma fille et moi ne voulons pas vivre dans un quartier où nous ne sommes pas les bienvenues. Et c'est ainsi qu'une fois de plus je me retrouvai à la rue. Lorsque j'avais vendu la maison où nous vivions, M. Lee et moi, pour retourner vivre à San Francisco, on m'avait fait comprendre que je ne pouvais pas acquérir de bien immobilier, car bien qu'étant de nationalité américaine j'étais veuve, or la loi stipulait que la signature de mon mari devait figurer sur l'acte de vente. Gideon m'avait proposé de m'acheter une maison, mais j'avais décliné son offre, car il m'avait déjà rendu un grand nombre de services. En outre, je tenais à garder mon indépendance. Etre locataire, lui avais-je dit, croyant que cela ne changerait rien, me convenait. Mais je ne savais pas alors que la guerre allait éclater. Je n'avais pas vu venir le cataclysme qui allait s'abattre sur ma vie et sur celle de millions d'autres gens. J'ignorais alors combien les préjugés raciaux pouvaient engendrer de haine. Les Chinois qui vivaient à l'extérieur de Chinatown avaient accroché des pancartes devant leurs maisons : «Nous chinois, pas japonais.» Certains d'entre eux portaient même des dossards afin de ne pas se faire agresser dans la rue. Comme je n'avais pas suivi leur exemple, les gens me soupçonnaient d'appartenir à l'ennemi. Pourtant, c'était mon ennemi à moi aussi. Lorsque j'appris dans les journaux que Singapour était tombée et que tous les Chinois avaient été arrêtés, je songeai à ce jour où, dans la rue, un homme élégant s'était appro-ché de ma mère et moi pour nous faire l'aumône. J'avais seize ans alors. Et cet homme était mon grand-père. Avait-il réussi à fuir lorsque les Japonais avaient envahi la ville ? Et le reste de sa famille qui vivait dansla grande maison de Peacock Lane — Elégance Dorée et Aube d'Eté, les épouses des deux frères de ma mère, le premier jeune maître et le second jeune maître, ainsi que ses deux demi-sœurs, Orchidée de Lune et Cannelle de Lune ? Avaient-elles réussi à s'échapper, ou étaient-elles tombées aux mains de l'ennemi ? A l'usine, j'avais fait de mon mieux pour réconforter les ouvriers dont les parentes avaient été violées ou assassinées par les soldats japonais. J'organisai des galas de bienfaisance pour récolter des fonds et venir en aide aux Chinois, par le biais de la United China Relief. J'expédiai des médicaments dans les provinces de Chine déchirées par la guerre. J'encourageai mes ouvriers à boycotter les produits japonais. A suivre