Performance n La générale de la pièce «L'aube Ismaël», tirée de l'œuvre de Mohammed Dib, a été présentée jeudi, sur les planches du Théâtre national algérien et ce, devant une assistance nombreuse et attentive. Cette adaptation signée et mise en scène par Hadda Djaber se présente comme une confrontation intelligente, une dualité s'avérant une performance entre deux personnages respectivement joués par Meryem Medjkane et Tarik Bouarrara, ce qui confère au texte toute sa portée philosophique et sa teneur artistique. L'action se déroule dans un jeu pertinent, recherché et, d'un bout à l'autre de cette représentation, l'on est emporté dans «l'immensité d'un désert sublimé, à la sagesse qui finira par ramener à la condition humaine, dans une dualité entre le néant et l'être». C'est ainsi que le jeu qui évolue entre mysticisme et universalité est traversé par «la métaphore de la traversée du désert avec toutes les douleurs et les souffrances qu'elle implique». Tout cela se déroule sur une scène dénué de décor ; point de scénographie. Toutefois, le jeu est nourri par la puissance et la profondeur du texte à dimension philosophique et symbolique qui, d'ailleurs, compense l'absence de décor. A cela s'ajoute la lumière signé Mokhtar Mouffouk. En effet, l'éclairage, intelligemment étudié, donne au jeu toute son intensité scénique : il plonge la scène et enveloppe le jeu dans des atmosphères vives. Cela rend aussitôt la mise en scène concluante rehaussée par des figures chorégraphiques signées Tarik Bouarrara. L'autre élément venant compenser l'absence de décor, c'est bien la musique. Signée Abdul Kader Sofi, la musique, au son lent et apaisant, rendue dans un esprit narratif par les sonorités du goumbri, du luth ou des percussions a accentué l'ambiance et soutenu les atmosphères qui imprègnent le jeu, incitant à la réflexion et la méditation. Et suscitant énormément d'émotion. Force est de constater que le spectacle «L'aube Ismaël», qui se présente comme un voyage à travers la poésie de Mohammed Dib, met en scène l'harmonie entre le théâtre, la danse, les arts plastiques et la musique avec un montage de textes et une mise en scène habile. Ainsi, le croisement des arts (théâtre, danse, arts plastique et musique) crée, selon les concepteurs du spectacle, «subtilement l'univers de ce grand amoureux de la langue française et la présence ponctuelle de l'arabe dialectal souligne la musicalité de cette longue adresse métaphorique». Concernant la thématique abordée à travers cette création, il est souligné qu'en tant que traversée universelle de l'exil «L'Aube Ismaël» nous entraîne dans un voyage initiatique où l'absence, l'exil, le silence, la quête et la renaissance sont constamment présents et nous interpellent. Cette traversée du désert – au sens propre et figuré – par le mysticisme et l'universalité qu'elle dégage touche au plus profond».Il est également précisé que «si la poésie de Mohammed Dib demande une attention soutenue, la musique qu'elle dégage suscite écoute et émotion». Les porteurs de ce spectacle soulignent à propos des enjeux du projet qu'il s'agit de «soutenir la création contemporaine et pluridisciplinaire des deux rives méditerranéennes et fédérer un large public en lui permettant de découvrir l'énergie, l'audace créative nés du désir profond d'échange et de confrontation artistique sur les deux rives». Et également mettre en avant l'universalité de l'œuvre de Mohammed Dib.Pour rappel, l'adaptation et la mise en scène de «L'Aube Ismaël» au théâtre s'inscrit dans le cadre de l'initiative «Les Itinérantes», qui s'articule autour de trois territoires spécifiques qui posent, chacun à leur manière, la question de l'exil, des stages ayant été organisés en septembre et octobre 2016. Ces stages se sont déroulés à Alger au Théâtre national d'Alger en collaboration avec l'association Chrysalide, à Tlemcen au palais de la culture en collaboration avec l'association la Grande Maison et Oran à l'Institut français en collaboration avec l'association Bel Horizon. Ce projet est initié par «La compagnie Leila Soleil» créée en l986 par Hadda Djaber.