Réaction n Donald Trump a défendu jeudi son ministre de la Justice, cible de nouvelles accusations dans l'affaire des contacts supposés entre son entourage et des responsables russes, pendant la campagne électorale de l'an dernier. Jeff Sessions, fidèle du président américain dont il a inspiré la politique anti-immigration, a reconnu avoir rencontré l'ambassadeur russe aux Etats-Unis à deux reprises l'année dernière, en contradiction apparente avec des déclarations récentes. L'opposition démocrate a demandé la démission du ministre et la nomination d'un procureur indépendant pour enquêter sur les tentatives d'ingérence de la Russie dans le processus électoral américain. Mais Donald Trump a déclaré avoir une confiance "totale" en son Attorney General, lors d'un déplacement sur le porte-avions Gerald Ford en Virginie. Tout en ajoutant qu'il "n'était pas au courant" de ces contacts avec le diplomate russe, Sergueï Kisliak. Jeff Sessions, alors sénateur, est le deuxième proche du milliardaire à être accusé de n'avoir pas dit toute la vérité sur ses contacts avec des responsables russes, après Michael Flynn, qui a démissionné le 13 février de son poste de conseiller à la sécurité nationale. Cette affaire à tiroirs empoisonne le début de mandat du successeur de Barack Obama et alimente les soupçons sur le rapprochement envisagé avec Moscou. Au sein de la majorité, le malaise enfle. Plusieurs élus républicains ont défendu Jeff Sessions, mais des voix s'élèvent pour réclamer la nomination d'un procureur indépendant. Sous l'administration Obama, Washington a accusé Moscou d'avoir mené en 2016 une campagne de piratage et de désinformation pour tenter de discréditer Hillary Clinton. Donald Trump a nié à plusieurs reprises toute collusion avec la Russie, bien que l'enquête menée par le FBI ait mis en évidence des contacts entre des membres de son équipe et des proches du Kremlin, selon plusieurs médias. "Nous n'avons vu aucune preuve impliquant aucun membre de l'équipe Trump", a rappelé le président républicain de la Chambre des représentants, Paul Ryan. Jeff Sessions a confirmé avoir rencontré l'ambassadeur Sergueï Kisliak en marge d'un discours en juillet puis dans son bureau de sénateur en septembre, comme l'a révélé mercredi soir le Washington Post. Il a affirmé que les rendez-vous étaient légitimes, dans le cadre de ses fonctions de parlementaire. Or M. Sessions avait déclaré devant le Sénat, lors de son audition de confirmation en janvier, qu'il n'avait "pas eu de contacts avec les Russes", ce qui constitue pour les démocrates un mensonge, voire un parjure. "Je n'ai jamais rencontré de Russes pour discuter d'une campagne politique", a précisé le ministre jeudi à la chaîne NBC. "Le département de la Justice doit être au-dessus de tout reproche. Pour le bien du pays, le ministre Sessions doit démissionner", a déclaré le chef de file des démocrates du Sénat, Chuck Schumer. Les responsabilités actuelles de Jeff Sessions sont au cœur du problème. L'Attorney General supervise le FBI et donc l'enquête menée par les autorités américaines sur les ingérences russes. Un procureur indépendant ? n En tant que ministre de la Justice, Jeff Sessions supervise le FBI et donc les diverses enquêtes sur ces affaires russes. Dans l'hypothèse où M. Sessions ferait lui-même l'objet d'une enquête, des élus des deux camps l'ont appelé à se déclarer incompétent sur ce dossier. Ce qu'il a fait jeudi, en annonçant qu'il se récusait de toute enquête portant sur la campagne. Il a démenti avoir commis un quelconque acte illicite lors de ces rencontres ou d'avoir menti pendant ses auditions de confirmation. Les démocrates craignent que les républicains, qui contrôlent le Congrès, n'étouffent ces enquêtes pour protéger le président américain. Plusieurs d'entre eux ont appelé à lancer une enquête bipartite indépendante qui nécessiterait la nomination d'un procureur indépendant, la création d'une commission d'experts sans liens avec le gouvernement ni avec une commission au Congrès. Les enquêteurs pourraient aussi chercher à déterminer les liens financiers présumés de Donald Trump avec la Russie ou à confirmer d'autres allégations non vérifiées contenues dans un dossier rédigé par un ancien espion britannique. Mais les républicains ont jusqu'à présent refusé d'aller au-delà des enquêtes en cours au sein des commissions parlementaires. Quelles conséquences ? n Michael Flynn, conseiller à la sécurité nationale du président républicain, a été forcé à la démission le 13 février pour avoir eu plusieurs discussions avec l'ambassadeur russe aux Etats-Unis, Sergueï Kisliak, y compris le jour où le président sortant Barack Obama a annoncé l'expulsion de 35 diplomates russes en représailles à l'interférence. Les enquêteurs cherchent à savoir si M. Flynn a évoqué les sanctions contre Moscou dans ces conversations. Michael Flynn, qui a conseillé M. Trump pendant la campagne sur les questions de sécurité nationale, a été payé par la Russie pour assister à un gala en 2015 à Moscou, où il était assis à côté de Vladimir Poutine. Jeudi, les chefs démocrates ont réclamé que le ministre de la Justice démissionne lui aussi pour avoir caché ses contacts avec le même ambassadeur lors de son audition de confirmation au Sénat. Dans son communiqué, M. Trump a estimé que M. Sessions "n'a rien dit de faux" devant les sénateurs, reconnaissant qu'il aurait pu répondre "plus précisément" aux questions des parlementaires. "Mais ce n'était clairement pas intentionnel", a-t-il ajouté, après l'avoir assuré plus tôt de sa "totale" confiance.