Revirement n La Maison Blanche a dénoncé hier avec fermeté l'attaque chimique meurtrière menée dans le nord-ouest de la Syrie, durcissant soudainement le ton à l'encontre du président Bachar al-Assad qu'elle tient pour responsable de cet "acte odieux". Cette condamnation s'est cependant accompagnée une nouvelle fois d'un appel à reconnaître la "réalité politique" en Syrie, illustrant le désarroi du nouveau locataire de la Maison Blanche face à une guerre qui a déjà fait plus de 320.000 morts. "L'attaque chimique perpétrée aujourd'hui en Syrie contre des innocents, y compris des femmes et des enfants, est répréhensible et ne peut être ignorée par le monde civilisé", a déclaré le président Donald Trump dans un communiqué --tardif par rapport aux réactions outrées d'autres capitales. Son secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson a prévenu de son côté que Bachar al-Assad devait "rendre des comptes" pour les attaques chimiques de son régime et a exhorté la Russie et l'Iran à mettre au pas leur allié. "Nous appelons la Russie et l'Iran, une fois encore, à exercer leur influence sur le régime syrien pour garantir que ce genre d'attaque atroce n'ait plus jamais lieu", a déclaré le chef de la diplomatie américain. "Quiconque utilise des armes chimiques pour attaquer son propre peuple montre un mépris fondamental pour la décence humaine et doit rendre des comptes", a-t-il ajouté. Il y a quelques jours, M. Tillerson avait pourtant affirmé que le sort du président Assad devait être décidé par "le peuple syrien", une approche mise en avant de longue date par Moscou, qui soutient le régime en place à Damas. M. Tillerson doit se rendre en Russie la semaine prochaine. "Il faut choisir ses batailles", avait de son côté déclaré l'ambassadrice américaine à l'ONU Nikki Haley, jugeant que la priorité de Washington n'était plus de se concentrer sur le départ d'Assad. Cette attaque aérienne sur Khan Cheikhoun, petite ville de la province d'Idleb, a fait au moins 58 morts et quelque 170 blessés et a provoqué une vague d'indignation internationale. L'armée syrienne a démenti catégoriquement toute implication. S'il a reconnu qu'il n'existait à ce stade "pas de véritable option pour un changement de régime", Sean Spicer, porte-parole de M. Trump, a jugé qu'il serait "dans l'intérêt" des Syriens que Bachar al-Assad ne soit pas au pouvoir. "Tout dirigeant qui traite son peuple comme cela, mort et destruction... Je ne pense pas que qui que ce soit souhaite cela pour un peuple", a-t-il déclaré. «Mardi noir»
l Le bilan de l'attaque, qualifiée d'"inhumaine", d'une "cruauté sans équivalent", voire de "crimes de guerre" par le patron de l'ONU Antonio Guterres, s'élevait mercredi à 72 civils tués, dont 20 enfants, et plus de 160 blessés, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). "Il y a également 17 femmes parmi les victimes et le bilan pourrait encore augmenter car il y a des personnes disparues", a précisé l'OSDH, qui avait auparavant rapporté un bilan de 58 morts pour ce "mardi noir". Ces victimes ont été prises de convulsions alors qu'elles se trouvaient chez elles ou dans la rue lorsque le raid aérien a visé, mardi vers 07H00 (04H00 GMT), Khan Cheikhoun, petite ville de la province rebelle d'Idleb dans le nord-ouest. Selon des médecins sur place, les symptômes relevés sur les patients sont similaires à ceux constatés sur des victimes d'une attaque chimique, notamment avec des pupilles dilatées, des convulsions et de la mousse sortant de la bouche. Des vidéos de militants antirégime ont montré des corps pris de spasmes et de crises de suffocation. L'OSDH a rapporté que des avions de combat avaient "mené au moins cinq nouvelles frappes sur la ville ce mercredi matin". A la suite de l'attaque, l'hôpital dans lequel les victimes étaient soignées a été bombardé hier à deux reprises, provoquant d'importantes destructions et la fuite précipitée de médecins, au milieu des cris et des pleurs. Damas dément n Malgré de multiples accusations, le gouvernement syrien a toujours démenti utiliser des armes chimiques depuis le début en 2011 de la guerre, qui a déjà fait plus de 320.000 morts. Il a ratifié la Convention sur l'interdiction des armes chimiques en 2013 mais l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a récemment indiqué enquêter sur plusieurs attaques présumées au gaz toxique commises depuis le début de l'année. Principal soutien du régime, l'armée russe a affirmé n'avoir mené aucun raid aérien dans la zone de Khan Cheikhoun. Mais pour l'opposition syrienne, il ne fait pas de doute que le régime de Damas a utilisé des "obus contenant du gaz chimique". Ce "crime horrible" rappelle l'attaque de l'été 2013 que la communauté internationale avait "laissé impunie", a-t-elle dénoncé. Moscou défend Damas La Russie a volé ce mercredi au secours du régime de Damas. L'armée russe a en effet affirmé ce mercredi que l'aviation syrienne avait bombardé la veille près de Khan Cheikhoun "entrepôt" des rebelles où étaient entreposées des "substances toxiques", au lendemain d'une attaque "chimique" ayant coûté la vie à au moins 72 civils. "Selon les données objectives du contrôle russe de l'espace aérien, l'aviation syrienne a frappé près de Khan Cheikhoun un grand entrepôt terroriste", a déclaré le ministère russe de la Défense dans un communiqué. Il abritait "un atelier de fabrication de mines artisanales, avec des substances toxiques", a affirmé le ministère, sans préciser si l'aviation syrienne avait connaissance du contenu de cet entrepôt. "L'arsenal d'armes chimiques" était destiné à des combattants en Irak a ajouté le ministère, qualifiant ses informations d'"entièrement fiables et objectives". L'utilisation de cet arsenal "par des terroristes a été à plusieurs reprises prouvé par des organisations internationales ainsi qu'aux autorités officielles" de l'Irak. L'armée russe ne précise donc pas si le régime syrien avait connaissance de la présence d'armes chimiques et surtout pointe de fait la responsabilité des "terroristes" en les accusant de détenir des armes chimiques. Au moins 72 civils ont été tués, dont 20 enfants, le corps saisi de convulsions et peinant à respirer sous leurs masques à oxygène, dans un raid aérien mené sur Khan Cheikhoun, un fief rebelle et jihadiste du nord-ouest syrien. L'opposition syrienne a la première accusé le "régime du criminel Bachar" d'avoir perpétrée cette attaque, avec des "obus" contenant du "gaz toxique", et a appelé le Conseil de sécurité de l'ONU à ouvrir immédiatement une enquête. Washington, Londres et Paris ont également accusé Damas qui nie et incrimine les rebelles.