Le crédit est le frère de la dette : qui contracte un crédit s'endette... Mais en Algérie, on a tendance à réserver le mot kridi, emprunté au français, dans le sens de «payer à crédit, acheter quelque chose à crédit». On peut contracter un crédit auprès de n?importe qui, mais son lieu de prédilection est l'épicerie, le magasin d'alimentation générale où l?on s'approvisionne en denrées de toutes sortes... On a gardé, dans les campagnes et même dans les centres urbains de l'intérieur, l'habitude, disparue dans les grandes villes, de faire tenir des ardoises, ou plutôt des carnets de crédit : chacun y a sa feuille, avec les achats qu?il fait et qu'il doit payer à la fin du mois, quand il aura perçu son salaire. Mais comme le crédit tue le commerce, beaucoup de commerçants remettent en question la tradition du prêt. C'est pourquoi on voit des pancartes apostrophant d'éventuels candidats au crédit : «Pas de crédit», « La maison ne fait pas de crédit», «Payez cash» ou, quand la communication est orale, «makache lkridi», «ulach akridi» ! Mais comme les commerçants connaissent les clients, ils sont toujours prêts à faire des exceptions, des exceptions qui n'en sont plus quand elles sont accordées à tout le monde. On fait donc crédit, quitte à s'endetter soi-même auprès des fournisseurs ! Comme les dettes, le crédit est redouté : on ne sait pas si on aura les moyens de payer, on a peur de mourir sans avoir réglé son ardoise. Mais la tentation est forte, chez beaucoup, aujourd'hui, de s?équiper en matériel électroménager, en véhicules et en meubles que l'on achète à crédit. On est encore loin du surendettement des Européens, mais au train où vont les choses, il y a des risques de faire comme eux. Gare aux huissiers ? on dit lussi ? qui viennent saisir les produits impayés et s'emparer des biens des mauvais payeurs... «Sellek ddînak» (paye tes dettes), dit l'adage. Le mieux, encore, est de ne pas en avoir !