Jusqu?au début des années 1970, toutes les municipalités étaient dotées de fourrières et de personnel qualifié pour recueillir les animaux errants. Leur véhicule était aménagé en cage. Ils se servaient d?une sorte de lasso qui pendait au bout d?un long bâton pour capturer les chiens. Après cela, les animaux étaient mis en fourrière. Si leurs propriétaires étaient identifiés ou qu?ils se présentaient spontanément, leurs animaux leur étaient rendus après avoir été admonestés et verbalisés. Les chiens et chats, dont les propriétaires ne se sont pas manifestés et qui n?ont pu être placés auprès d?autres particuliers, seront soumis à la solution finale. Ils seront piqués. Mais de la façon la plus humaine possible. Aujourd?hui, il n?existe presque plus de fourrières pour animaux dans le pays. Certaines ont été cédées aux amis et ont été transformées en locaux commerciaux. Les chiens et les chats errants pullulent dans les agglomérations. Souvent des meutes de chiens devenus sauvages et parfois enragés s?attaquent à des personnes isolées. Il y a même eu des personnes tuées et dévorées. Personne ne sait d?où peuvent bien venir tous ces chiens. Est-ce un exode rural canin dû au terrorisme après que leurs propriétaires ont fui la campagne et les ont abandonnés à leur propre sort ? Les pouvoirs publics font comme si de rien n?était et ne réagissent que lorsqu?il y a péril en la demeure, en l?occurrence lorsque des cas de rage sont signalés ou lorsque trop de personnes sont agressées par les chiens. La solution est toujours la même et porte un nom à la mode dans notre pays : l?éradication. Celle-ci consiste à abattre les chiens, sur la voie publique même. Le massacre se commet en pleine nuit. Des policiers, des gardes champêtres et même des chasseurs sont mis à contribution et les chiens sont traqués en une sorte de battue nocturne jusqu?à leur complète extermination. Il y a même des histoires de responsables qui font des cartons sur les chiens, histoire de s?entraîner. Il y a quelques années, dans une ville de l?Est, plus de quatre cents chiens furent abattus en une seule nuit. Leurs hurlements d?épouvante et de douleur ont duré jusqu?à l?aube. Il a fallu recourir à des engins de travaux publics pour enterrer les cadavres de ces pauvres bêtes. Un charnier dont personne ne rendra compte.