Portrait Ils ont entre 30 et 40 ans. Ils sont, pour la plupart, des universitaires, ils refusent désormais le statut de «diplômés oisifs» et ont la capacité d?identifier les besoins d?un lectorat de 10 à 60 ans. Ce sont les bouquinistes de la Grande-Poste à Alger. «Au début, les démêlés avec la police étaient nombreux, n?était l?intervention des autorités locales et du bureau exécutif communal», dit Mourad, 33 ans, licencié en anglais et vendeur de livres d?occasion. L?APC s?est chargée ainsi de donner un caractère officiel à cette manifestation par l?octroi d?autorisations d?exercer contre le paiement mensuel d?une modique taxe sur l?activité. Tous les genres de livres y sont exposés à côté des dictionnaires, des encyclopédies, de la documentation et des manuels techniques. La musique n?est pas en reste, puisque, outre les cassettes et les CD-ROM, on retrouve des disques de papa, des 33 aux 45 tours, un véritable trésor. Les prix pratiqués par ces vendeurs de livres d?occasion sont à la portée de tout le monde. «C?est une culture à bon marché», souligne un sexagénaire venu acheter un bouquin d?aventures policières, «Je suis un nostalgique de l?époque où les Algériens aimaient beaucoup lire. Je crois que cette époque est révolue», constate-t-il amèrement. En effet, un roman policier coûte 30 DA chez ces bouquinistes, un dictionnaire Larousse français de 60 000 mots est cédé à 150 DA, un magazine Science et vie fait 60 DA, une encyclopédie coûte 200 DA. Ces bouquinistes attendent, depuis un certain moment, l?octroi par l?APC de kiosques où ils pourront exercer tranquillement leur profession. «Il nous faut absolument un kiosque où on peut abriter notre marchandise très fragile. La moindre précipitation peut endommager la totalité de nos livres. En hiver, c?est l?enfer on ne peut pratiquement pas travailler», dit Abderahmane, 38 ans, ex-enseignant du secondaire. Aujourd?hui, ces marchands de livres s?installent en solo, en duo ou en groupes, ils se sont néanmoins constitués en comités pour défendre leurs droits moraux et matériels et dissuader, surtout, les opportunistes et les indus occupants qui ont tenté de passer à travers les mailles du filet, flairant la bonne affaire. L?approvisionnement se fait par le biais de citoyens en butte à des difficultés financières et qui se séparent, la mort dans l?âme, de leur trésor inestimable.