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Histoires vraies
Un sursaut (1re partie)
Publié dans Info Soir le 10 - 01 - 2005

C'est un cri. Un cri long, ininterrompu, modulé comme un chant sauvage. Un cri venu du plus profond de cette femme, couchée sur la table de travail. Un cri qui dure depuis une éternité. lIs sont là tous les deux, comme des silhouettes de cauchemar. Elle, étendue, recouverte d'un drap blanc, ruisselante, bouche ouverte sur le cri, épuisée. Lui, debout, en blouse blanche, transpirant, les deux mains appliquées sur son ventre, acharné.
Elle accouche. Elle essaie d'accoucher depuis des heures. Il l'aide. Il tente de l'aider depuis des heures. La chaleur est infernale. Saigon, l'été, transforme n'importe quelle pièce en fournaise. Il lui parIe, mais il n'entend pas ses propres paroles, le cri les couvre. D'ailleurs, il ne sait même pas ce qu'il dit. Des choses comme : là... du calme... doucement... respirez... encore... là... là... Comme si le médecin chantait lui aussi, à mi-voix, pendant que la patiente continue de hurler. lIs se connaissent. Les Américains de Saigon, en 1947, ne sont pas si nombreux. Il est le médecin de la petite colonie et il sait depuis le début que ce n'est pas gagné.
Danaë Folk veut cet enfant depuis des années. Elle y a mis tout l'acharnement dont une femme est capable dans ces cas-là. Elle a tout subi, tout essayé. A présent, elle a quarante-deux ans, elle vient de passer huit mois couchée, couvant avec obstination une petite chose inconnue, douloureuse, qui a décidé de venir trop tôt, huit mois à peine. La mère est fragile, trop nerveuse. Et ce cri ! Ce cri qui n'en finit pas ! Où va-t-elle chercher ce souffle ? Comment fait-elle pour ne pas s'évanouir de fatigue et de douleur ? Trois fois déjà, elle a refusé la piqûre. Elle ne veut pas s'endormir, elle veut accoucher, seule. Il y a trop longtemps qu'elle attend cette minute et il faut qu'elle y arrive. Chaque fois que le médecin fait mine d'approcher de sa bouche un tampon d'éther, elle secoue la tête comme une furie, tire sur les liens qui maintiennent ses épaules avec une force incroyable. Elle crie pour rester lucide, autant que pour supporter la souffrance ; il le comprend. Il a renvoyé l'infirmière pour être seul avec elle et l'aider le plus possible. Mais que faire d'autre que compter, une par une, les contractions, leur durée, leur intensité ?
Soudain, le cri s'arrête. Et le silence est si brutal que le médecin sursaute. Penché sur le petit visage blême, il demande : «Danaë, ça va ?»
Elle a cligné des paupières pour le rassurer. Sueur et larmes mélangées lui brouillent les yeux, elle ne voit qu'un visage flou, irréel, et s'adresse à lui comme dans un rêve. Elle veut savoir combien de temps encore. Alors, il ment par habitude. Il ment toujours aux femmes qui souffrent. Il dit : «Quelques minutes. Courage, c'est bientôt fini.»
Le docteur Finley en a tant vu. Il ne compte plus les nuits passées à guetter l'apparition d'une petite tête frisée, rouge et furieuse. Une bonne centaine déjà, rien qu'à Saigon. De gros bébés, ronds, blancs et américains, des tout-petits aux cheveux noirs et luisants, au teint bistre, des noirs aussi, garçons et filles? Il en a tant vu naître et mourir, petits corps inertes, déposés avec soin loin des regards de la mère évanouie.
La nuit va tomber, la chaleur est lourde, l'humidité colle à la peau et Danaë aussi va s'évanouir, le docteur Finley en est sûr. Tout va mal. Un tonicardiaque, une main sur le front, foutaises que tout cela ! Ce fichu pressentiment qu'il a déjà connu le taraude. Pauvre femme, il ne saurait dire pourquoi, mais c'est fichu. Le gosse ne tiendra pas. Les douleurs ont commencé trop tôt.
Danaë ne crie plus depuis cinq minutes. Elle ne va pas plus mal. Elle guette. Surprise de l'arrêt de l'immense douleur. Elle regarde le plafond blanc, le ventilateur qui tourne avec un léger bruit inutile. Les muscles endoloris attendent. Mais ce répit ne peut pas durer. La houle va reprendre et renouveler le cri ! Les secondes, les minutes s'égrènent... Le docteur Finley se penche, ausculte, l'oreille plaquée sur le ventre où la vie est là, qui attend, comme si l'enfant rassemblait ses forces dans son antre. (à suivre...)


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