Dans la capitale d'un royaume de la Chine, très riche et d'une vaste étendue, il y avait un tailleur nommé Mustafa, sans autre distinction que celle que sa profession lui donnait. Mustafa, le tailleur, était fort pauvre, et son travail lui produisait à peine de quoi les faire subsister lui et sa femme, et un fiIs que Dieu leur avait donné. Le fiIs, qui se nommait Aladdin, avait été élevé d'une manière très négligée, et qui lui avait fait contracter des inclinations vicieuses. ll était méchant, opiniâtre, désobéissant à son père et à sa mère. Sitôt qu'il fut un peu grand, ses parents ne le purent retenir à la maison ; il sortait, dès le matin, et il passait les journées à jouer dans les rues et dans les places publiques avec de petits vagabonds qui étaient même au-dessous de son âge. Dès qu'il fut en âge d'apprendre un métier, son père, qui n'était pas en état de lui en faire apprendre un autre que le sien, le prit en sa boutique, et commença à lui montrer de quelle manière il devait manier l'aiguille ; mais ni par douceur, ni par crainte d'aucun châtiment, il ne fut pas possible au père de fixer l'esprit volage de son fils : il ne put le contraindre à se contenir et à demeurer assidu et attaché au travail, comme il le souhaitait. Sitôt que Mustafa avait le dos tourné, Aladdin s'échappait, et il ne revenait plus de tout le jour. Le père le châtiait ; mais Aladdin était incorrigible, et, à son grand regret, Mustafa fut obligé de l'abandonner à son libertinage. Cela lui fit beaucoup de peine ; et le chagrin de ne pouvoir faire rentrer ce fiIs dans son devoir lui causa une maladie si opiniâtre qu'il en mourut au bout de quelques mois. La mère d'Aladdin, qui vit que son fils ne prenait pas le chemin d'apprendre le métier de son père, ferma la boutique et fit de l'argent de tous les ustensiles de son métier, pour I?aider à subsister, elle et son fils, avec le peu qu'elle pourrait gagner à filer du coton. Aladdin, qui n'était plus retenu par la crainte d'un père et qui se souciait si peu de sa mère qu'il avait même la hardiesse de la menacer à la moindre remontrance qu'elle lui faisait, s'abandonna alors à un plein libertinage. ll fréquentait de plus en plus les enfants de son âge, et ne cessait de jouer avec eux avec plus de passion qu?auparavant. ll continua ce train de vie jusqu'à l'âge de quinze ans, sans aucune ouverture d'esprit pour quoi que ce soit et sans faire réflexion à ce qu'il pourrait devenir un jour. Il était dans cette situation, lorsqu'un jour qu?il jouait au milieu d'une place avec une troupe de vagabonds, selon sa coutume, un étranger qui passait par cette place s'arrêta à le regarder. Cet étranger était un magicien insigne que les auteurs qui ont écrit cette histoire nous font connaître sous le nom de Magicien Africain : c'est ainsi que nous l'appellerons, d'autant plus volontiers qu'il était véritablement d'Afrique, et qu'il n'était arrivé que depuis deux jours. (à suivre...)