Résumé de la 1re partie La presse titre sur le drame d'une famille déchirée, d'une mère de famille lasse des coups et de l'ivresse de son époux, de deux garçons qui ont commis un parricide. Les deux garçons ont avoué, ils ont tiré chacun une balle, ils partagent donc la responsabilité du parricide. Deux de leurs s?urs, vivant encore au domicile des parents, ont confirmé le calvaire de leur mère. Christophe et Adrien sont montés dans la camionnette de la gendarmerie en baissant la tête, à cause des photos, tandis que le corps de leur père était emmené à la morgue pour l'autopsie. Une histoire tristement simple. Jusqu'au moment où le médecin légiste donne son rapport au juge d'instruction. La première balle a atteint le père alors qu'il était assis. Il est impensable qu'il se soit montré agressif après cette blessure et qu'il se soit redressé, un couteau à la main, pour poursuivre son fils jusqu'à la terrasse. En ce qui concerne l'ivresse, l'estomac contenait la valeur d'un verre de vin. Même pour un homme fluet, de son gabarit, on ne peut pas parler d'alcoolémie élevée... Là-dessus, les collègues de travail de la victime, une trentaine de chauffeurs routiers, s'allient pour adresser au juge une pétition donnant une tout autre image de leur copain, P?tit Jean. Selon eux, P'tit Jean n'était pas à traîner au bistrot et il n'a jamais eu un ennui avec la police de la route. Un chauffeur routier alcoolique, ça se repère, non seulement dans la profession, mais aussi sur la route. C'était un type bien, qui trimait toute la semaine sur les routes, comme les autres, et dont le ménage ne marchait pas. Le juge se retrouve donc devant un portrait de victime complètement différent de celui évoqué par la famille, c'est-à-dire par la mère, les deux frères meurtriers et les trois s?urs. Tous les enfants ont déclaré la même chose : leur père battait leur mère, qui vivait un calvaire depuis des années et n'en pouvait plus. Mais qui a vu, réellement vu, Jean complètement ivre et battant sa femme ? Personne. Ni les garçons ni les filles ne peuvent décrire de scènes précises. Depuis toujours, c'est leur mère qui les leur raconte. Ça allait tellement mal, d'ailleurs, que le père dormait à la cave quand il revenait pour les week-ends. Il ne mangeait même pas avec sa famille. Et la mère disait : «Il était encore saoul... Dimanche, il m'a cogné dessus.» Marie ne s'est jamais plainte en dehors de la maison. Un collègue de travail ne lui a jamais vu de bleus. Il faudrait en conclure que, chaque week-end, Jean ne rentrait chez lui que pour boire, cogner sur sa femme et s'enfermer ensuite dans la cave pour y dormir. Et cela depuis trente ans ! Drôle d'existence, drôle d'atmosphère... Le 16 juillet 1988, lorsque Christophe arrive au camping, la rengaine est la même : «Fais attention, ton père est complètement saoul !» Christophe ne vit plus à la maison. Il est chauffeur livreur et, pour les vacances, il est venu s'installer, avec sa caravane, sur le camping géré par sa mère. Adrien ne peut pas dire précisément qu'il a vu son père battre sa mère. Mais elle le répétait régulièrement, à chaque fin de semaine. «Il m'a battue, il est saoul !» Saoul, toujours saoul... ils n'ont tous que ce mot à la bouche. Alors que le soir où ils l'ont tué, le père n'avait qu'un verre de vin dans l'estomac. Saoul de quoi, alors ? Peut-être d'autre chose... (à suivre...)