Cas n Abdelkader Aïche habite au 22, rue Ferdinand-Coste depuis 1991, avec quatre autres membres de sa petite famille. «Il s?agit de la demeure d?une parente qui l?a ramené pour vivre avec elle», explique son épouse Farida. Le moins que l?on puisse dire est que la bâtisse n?est pas sûre. Elle est en ruine, des murs et des plafonds effondrés. A tout moment, le premier étage risque de s?écrouler sur la tête des occupants du rez-de-chaussée. La famille Aïche craint le pire, car ce n?est pas l?unique danger qui la menace. «La maison voisine, soit le n°20, est complètement en ruine. Il ne suffit que d?une seule secousse ou du survol d?un avion pour qu?elle s?effondre sur nos têtes», signale le père de famille Abdelkader. Une visite des lieux nous a permis de constater l?ampleur des dégâts. Les murs ne sont pas seulement lézardés. La structure de la bâtisse est totalement ébranlée. «Il y a quelques jours, l?électricité a provoqué une étincelle qui a failli provoquer un incendie. Nous avons dû la suspendre», précise Farida. Cette dernière affirme qu?ils ont attrapé deux serpents qui ont atterri dans leur cour. «Nous avons dû couper l?arbre surplombant notre cour pour éviter que d?autres descendent par le kef. Il y a une forêt au-dessus. Celle à côté du Monument (Riadh El-Feth). Je ne parlerai pas des rats qui vivent pratiquement avec nous au quotidien. Il y avait avant un bidonville qu?on a rasé il y a quelque temps. Cela n?a pas résolu le problème.» Ce couple ne comprend pas comment «des gens ont bénéficié de chalets et sont revenus se réinstaller dans le voisinage. D?autres louent alors que les maisons sont en ruine. Tant que les gens trouvent l?électricité et l?eau disponibles, c?est normal qu?ils reviennent». Le couple déplore : «A l?APC et à la daïra, on nous demande de revenir le dimanche ou le mercredi, mais à notre retour, nous ne trouvons personne. Personne ne nous reçoit, surtout à la daïra. Vous savez comment ils procèdent au trafic ? Ils donnent un logement à un voisin et laissent un autre. Ils font ça pour trois ou quatre maisons pour garder les nouveaux logements pour ceux qui paient une commission. Ils font ça à chaque quota délivré au profit des citoyens de Belouizdad.» Lors du séisme, les locataires de ce quartier ont été évacués dans des centres de transit, sous des tentes, mais sont revenus chez eux. Ils dénoncent la mauvaise gestion et le trafic de l?ancienne APC. La famille Guemaz compte 8 personnes. Elle réside au n°24, dans une pièce unique. La mère de famille a noté que «quatre garçons passent la nuit au n°20 qui menace ruine également. Nous n?avons pas le choix». Mme Guemaz affirme habiter cette pièce depuis 42 ans. Elle précise que «les services de réhabilitation des logements ont effectué des travaux uniquement au niveau des appartements de la propriétaire qui réside au même numéro». Eux aussi ont attrapé un serpent qui est descendu le long du figuier se trouvant dans la cour. Ils l?ont abattu, car les serpents s?y nichaient. «Des blocs du kef tombent à chaque fois au milieu de la cour. Un jour, quelqu?un sera tué. C?est un danger permanent» dit-elle. Elle raconte, également, qu?«un étranger avait atterri un jour dans la cour, car il était poursuivi par des agresseurs. A l?endroit où il y avait le bidonville, des jeunes s?adonnent à la drogue et agressent les gens de passage». l?équivalent des 22 et 24, rue Ferdinand-Coste, dans la commune de Belouizdad, à Alger, abrite des familles «sinistrées», qui habitent des maisons menaçant ruine et n?ayant pas été évacuées en même temps que leurs voisins des n°18 et 20 dont certains avaient bénéficié, déjà en 1990, puis en 2000, de logements sociaux. Le numéro 22 est classé «rouge» par les services du CTC, affirme Abdelkader Aïche, l?unique locataire. Une information qui a été confirmée par les services de l?Ofares, chargés de la réhabilitation des constructions. Selon ces mêmes services, la maison est proposée à la démolition. La commission étudie toujours le dossier. Le n°24, en revanche, a été réhabilité, «en partie», selon ses locataires. Il a été classé «orange 4». Le cas de ces locataires relance le débat sur la question du logement en Algérie, en général et particulièrement à Alger. La crise du logement s?est autant accentuée depuis les inondations du 10 novembre 2001 et encore plus avec le séisme du 21 mai 2003, notamment dans les vieux quartiers d?Alger où l?état de vétusté des bâtisses est très avancé. Pour ce cas précis, les familles Aïche, Guemaz et Saïdi, locataires des numéros 22 et 24 Ferdinand-Coste, s?interrogent : «Pourquoi les autres voisins ont été évacués et pas nous ?» Les autorités locales les considèrent comme des «indus occupants». Et les autres parties concernées restent injoignables.