Le cheikh Toumi a lui-même chanté, mais très peu, ayant été surtout un instrumentiste, jouant de la mandoline et aussi du violon. Pour réussir dans la musique constantinoise, il faut, explique Abdelmadjid Merdaci, «avoir une compétence technique en jouant bien d'un instrument, ou avoir une très belle voix». Le cheikh Toumi n'avait ni les doigts magiques pour faire parler son instrument ni la voix envoûtante si nécessaire à la musique constantinoise. Il avait la connaissance. De la langue, de l'histoire, de la poésie et surtout de la musique. Ses connaissances étaient immenses et le resteront pratiquement jusqu'à la fin. Si sa santé s'est considérablement dégradée depuis presque une dizaine d'années, perdant progressivement la vue et l'ouïe, il n'a rien perdu de ses facultés intellectuelles. Il pouvait, jusqu'à il y a quelques mois, réciter sans hésiter un très vieux poème, donner la réponse juste quand il faut trancher entre deux opinions divergentes sur une question liée à la musique constantinoise. C'est ce qui fait la particularité de cheikh Abdelkader Toumi dans le monde de la musique constantinoise : une immense connaissance qui en fait la référence, probablement inégalée, de tout ce qui touche à la musique constantinoise. Il était véritablement le «dépositaire de la mémoire de la musique constantinoise» et lui qui ne s'est jamais déclaré maître (cheikh), était probablement le dernier cheikh.