De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Même à l'ombre, l'enseignement de la musique fleurit en sourdine. La troupe El Inchirah à vocation andalouse, affiliée à une section des œuvres sociales de la Sonelgaz, serait l'exemple éloquent de ce postulat. Loin des notes «officielles» truffées de fioritures et autres appogiatures, cette école continue d'ouvrir ses portes musicales à des bambins depuis 29 ans pour leur apprendre les rudiments de ce chant ancestral, selon des règles basiques, mais payantes. Ainsi, on de nombre 6 promotions d'artistes qui en sont issues. Une production rassurante pour cheikh Toumi, Barachi, Bouaziz…, et autres maîtres disparus -ou peut-être ayant tout simplement pris une «fugue» de J. S. Bach– dès lors que leur spectre en continuo de cet héritage andalou demeure. Et, aujourd'hui, il est balisé par des pupitres d'une relève quasi certaine. Cela n'étant pas arrivé par hasard ; c'est un groupe homogène et convivial qui veille à la sérénité de cette école dont le maître mot est la formation. En effet, sous la baguette harmonieuse de M. K. Zarabi, les élèves perçoivent leurs premiers pas d'apprentissage à un bas âge. Ils entament leur formation instrumentale et vocale à partir de 7 ans. «C'est un solfège simplifié qu'on enseigne aux futurs musiciens. Ajoutez à cela le toucher de l'instrument. Il s'agit de la mandoline. Celle-ci les accompagnera durant au moins trois années. Le choix de cet instrument comme outil “imposé” à l'apprentissage n'est pas fortuit, puisqu'il permettra à l'élève dans peu d'années de s'initier à d'autres instruments sans éprouver beaucoup de difficulté», nous dira l'enseignant de cette école, qui y cumule 29 années d'exercice en solo, après avoir, lui aussi, fréquenté le conservatoire et pris des cours de musique andalouse avec le défunt Rabah Bouaziz. «On reçoit les disciples à leur état brut si l'on peut dire. Ils ne possèdent aucune notion de solfège ni de la pratique de l'instrument. C'est notre approche de travail. On veut inculquer cette musique aux tout débutants. Cela a du moins porté ses fruits. L'école renferme en son sein une quarantaine de musiciens, dont 25 formant l'orchestre. C'est la fierté de l'école», se félicite-t-il. Pour l'exercice écoulé, l'association a produit une douzaine d'initiés qui accèdent aux classes supérieures sur les trente inscrits en début d'année. Une fois ce palier atteint, ces élèves pourront côtoyer d'autres instruments, comme le violon, le luth et la mandoline. Trois musiciens issus des anciennes promotions précédentes se chargeront partiellement de cette transition sous les directives de Zarabi. Au plan compétitif, El Inchirah n'aura rien à envier aux autres associations locales. Elle s'est vu attribuer le troisième prix du Festival national du malouf tenu en juillet dernier à Constantine. D'aucuns estiment, cependant, que l'école avait «frôlé» la première place, qui est revenue à l'autre association, Maqam en l'occurrence. «Au Festival international qui s'est déroulé à Skikda le mois dernier, beaucoup de mélomanes nous ont rendu un vif hommage en nous félicitant pour la prestation artistique fournie», devait avouer modestement le responsable de l'école. En ce qui concerne ses activités internationales, l'association avait pris part à des représentations, dans le cadre du jumelage établi entre les mairies de Constantine et de Grenoble, en injectant six de ses éléments en compagnie d'un grand monde ayant «envahi la terre de l'Hexagone». Toutefois, on déplore vivement les critères qui avaient sanctionné la présélection. «A Grenoble, on n'est pas parti sur un pied d'égalité quant au nombre de participants», apprend-on. Cela s'explique évidemment par le caractère d'«appartenance» de l'école. Autrement dit, elle n'est pas sous «l'emprise» de l'hôtel de ville. Toujours dans ce sillage, l'association, qui est souvent invitée à des festivités, revendique un «chrono de programmation» assez étudié. «Parfois, on nous sollicite pour des prestations sans prendre en considération notre agenda. Il faut savoir que la majorité de nos artistes suivent un cursus scolaire», indique M. Bouabdallah, responsable du bureau. L'APC et la direction de la culture en sont averties pour perpétuer la joie à El Inchirah et ne pas briser son cœur ! Pour la prochaine rentrée, prévue en octobre, la direction compte élargir ses rangs. «Cette année, nous comptons recueillir des élèves dont les parents ne sont pas forcément fonctionnaires à la Sonelgaz», précise notre interlocuteur, tout en reconnaissant la bonne santé financière de l'école subventionnée intégralement par cette entreprise. Le professeur Zarabi entend apporter quelques expériences «musicales» dans les manifestations internationales. La fusion avec d'autres musiques du monde pourrait avoir lieu lors des manifestions et échanges culturelles. En somme, El Inchirah s'impose sur la scène sans tambour ni trompette, juste par des instruments atypiques à l'andalou…