Résumé de la 44e partie n Sindbad est chargé par le riche marchand, auquel il appartenait désormais, de surveiller et de tirer sur les éléphants. «Un matin, poursuivit Sindbad, que j'attendais l'arrivée des éléphants, je m'aperçus avec un extrême étonnement qu'au lieu de passer devant moi en traversant la forêt comme à l'ordinaire, ils s'arrêtèrent et vinrent à moi avec un horrible bruit et en si grand nombre que la terre en était couverte et tremblait sous leurs pas. Ils s'approchèrent de l'arbre où j'étais monté et l'environnèrent tous, la trompe tendue et les yeux attachés sur moi. A ce spectacle étonnant, je restai immobile et saisi d'une telle frayeur que mon arc et mes flèches me tombèrent des mains. Je n'étais pas agité d'une crainte vaine. Après que les éléphants m'eurent regardé quelque temps, un des plus gros embrassa l'arbre par le bas avec sa trompe, et fit un si puissant effort qu'il le déracina et le renversa par terre. Je tombai avec l'arbre ; mais l'animal me prit avec sa trompe et me chargea sur son dos, où je m'assis, plus mort que vif, avec le carquois attaché à mes épaules. Il se mit ensuite à la tête de tous les autres qui le suivaient en troupe, et me porta jusqu'à un endroit où, m'ayant posé à terre, il se retira avec tous ceux qui l'accompagnaient. «Concevez, s'il est possible, l'état où j'étais ; je croyais plutôt dormir que veiller. Enfin, après avoir été quelque temps étendu sur la place, ne voyant plus d'éléphants, je me levai et je remarquai que j'étais sur une colline assez longue et assez large, toute couverte d'ossements et de dents d'éléphants. Je vous avoue que ces objets me firent faire une infinité de réflexions. J'admirai l'instinct de ces animaux. Je ne doutai point que ce ne fût là leur cimetière et qu'ils ne m'y eussent apporté exprès pour me l'enseigner, afin que je cessasse de les persécuter, puisque je le faisais dans la vue seule d'avoir leurs dents. «Je ne m'arrêtai pas sur la colline ; je tournai mes pas vers la ville, et après avoir marché un jour et une nuit, j'arrivai chez mon patron. Je ne rencontrai aucun éléphant sur ma route, ce qui me fit connaître qu'ils s'étaient éloignés plus avant dans la forêt pour laisser la liberté d'aller sans obstacle à la colline. «Dès que mon patron m'aperçut : " Ah ! Pauvre Sindbad, me dit-il, j'étais dans une grande peine de savoir ce que tu pouvais être devenu. J'ai été à la forêt : j'y ai trouvé un arbre nouvellement déraciné, un arc et des flèches par terre ; et après t'avoir inutilement cherché, je désespérais de te revoir jamais. Raconte-moi, je te prie, ce qui t'est arrivé. Par quel bonheur es-tu encore en vie ?"» (à suivre...)