Conflit n Le bras de fer opposant les marins à leur direction glisse peu à peu vers un affrontement généralisé, avec la remise sur le tapis de la question d?autonomie. Ce qui était un simple bras de fer syndical, entre les travailleurs de la Sncm, firme maritime reliant la Corse au continent, et leur direction, prend soudainement des proportions politiques internationales. Paris a mis les pieds dans le plat en envoyant une expédition du Gign libérer le ferry «Pascal-Paoli» au large de Bastia, détourné par des marins grévistes. Une intervention considérée comme déplacée par les marins au vue de tout l?arsenal déployé à cet effet. Effectivement, les images diffusées montrent une scène de guerre. Cette action des Gign provoquera le contraire, puisque le conflit s?est durci depuis. A Ajaccio, la préfecture de région a été visée par un tir de roquette, jeudi. Le trafic maritime a été interrompu et l'essence commençait à manquer en Corse coupée du continent. Les manifestations de soutien au niveau de la Corse apparaissent de plus en plus fortement. Ce qui a poussé le Premier ministre, Dominique de Villepin, à jouer la «carte de l?apaisement» en déclarant que l?Etat fera son possible pour trouver une solution et se montra, du coup, «particulièrement inquiet» par le regain de violence. Il a prévenu qu'il n'y avait pas d'alternative à la solution qu'il avait présentée jeudi : maintenir les participations de l?Etat à 25%, alors que les grévistes campent sur leurs positions : «Aucune privatisation.» Pour la troisième journée consécutive, aucun bateau n'a relié l'île au continent. Plus de 80 camions sont immobilisés. Les manifestations de soutien aux salariés de la compagnie maritime en voie de privatisation et aux quatre marins du Syndicat des travailleurs corses (STC) se multiplient. Le port de Bonifacio a été bloqué vendredi à l'aube, interrompant les liaisons avec la Sardaigne. Ce matin, quelque 150 policiers et gendarmes, aidés de blindés légers, sont intervenus sur le port d?Ajaccio (Corse), bloqué par des mouvements sociaux, pour le rendre libre à la circulation. «Il sera le seul port de Corse qui fonctionnera à partir de maintenant», a expliqué le préfet de police de Corse, qui signale que plus de 10 000 personnes sont bloquées dans l?île ainsi que 6 à 7 000 véhicules. Mais selon les observateurs, le pire est à venir, puisque les syndicalistes préparent activement la rencontre du 4 octobre qui devrait réunir tous les syndicats marins autour de cette question. Paris se retrouve entre le marteau et l?enclume. D?une part, des marins décidés et qui ne veulent pas lâcher prise. D?autre part, l?Union européenne qui veut que la France accepte la privatisation, conformément à la législation européenne. Le Premier ministre français saura-t-il gérer sa première tempête ?