Résumé de la 28e partie n Après moult ruses et plusieurs jours de chevauchée, Kamaralzâman et Marzaouân arrivent enfin dans la ville du roi Ghaïour. Kamaralzamân voulut aller tout de suite au palais, mais Marzaouân lui dit de patienter encore et le mena au khân où descendaient les riches étrangers, et y resta avec lui trois jours pleins pour bien se reposer des fatigues du chemin. Et Marzaouân profita de ce temps pour faire confectionner, à l'usage du prince, un attirail complet d'astrologue, le tout en or et en matières précieuses ; il le conduisit ensuite au hammam et le vêtit, après le bain, de l'habit d'astrologue. Alors seulement, après lui avoir donné les instructions nécessaires, il le mena jusque sous le palais du roi et le quitta pour aller aviser la nourrice, sa mère de son arrivée, afin qu'elle en avertît la princesse Boudour. Quant à Kamaralzamân, il s'avança jusque sous le portail du palais... A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut. Lorsque fut la deux centième nuit, elle dit : ... Il s'avança jusque sous le portail du palais et, devant la foule massée sur la place et devant les gardes et les portiers, à haute voix il clama : «Je suis l'astrologue notoire, le magicien digne de mémoire ! Je suis la corde qui relève les rideaux les plus noirs et la clef qui ouvre les armoires et les tiroirs ! Je suis la plume qui trace les caractères sur les amulettes et les grimoires ! Je suis la main qui étend le sable divinatoire et tire la guérison du fond de l'écritoire ! «Je suis celui qui donne leurs vertus aux talismans, et qui obtient par la parole toutes les victoires ! Je fais dévier les maladies vers les émonctoires ; je ne me sers ni d'inflammatoires, ni de vomitoires, ni de sternutatoires, ni d'infusoires, ni de vésicatoires ! «Je n'use que d'oraisons jaculatoires, de mots évocatoires, de formules propitiatoires, et j'obtiens ainsi des cures péremptoires et méritoires ! «Je suis le magicien notoire, digne de mémoire : accourez tous me voir ! Je ne demande ni pourboire ni obole rémunératoire, car je fais tout pour la gloire !» Lorsque les habitants de la ville, les gardes et les portiers eurent entendu ce boniment, ils furent stupéfaits ; car depuis l'exécution sommaire des quarante médecins, ils croyaient cette race-là éteinte, d'autant qu'ils n'avaient jamais plus revu de médecin ou de magicien. Aussi, ils entourèrent tous le jeune astrologue ; et, à la vue de sa beauté et de son teint si frais et de ses autres perfections, ils furent charmés et en même temps bien désolés ; car ils eurent peur qu'il ne subisse le même traitement que ses prédécesseurs. Ceux qui étaient les plus proches du char recouvert de velours sur lequel il se tenait debout le supplièrent de s'éloigner du palais et lui dirent : «Seigneur magicien, par Allah ! ne sais-tu donc pas le sort qui t'attend si tu t'attardes par ici ? Le roi va te faire appeler pour que tu essayes ta science sur sa fille. Malheur à toi ! tu subiras le sort de tous ceux-là dont la tête coupée est suspendue juste au-dessus de toi !» Mais à toutes leurs objurgations Kamaralzamân ne répondait qu'en criant plus haut : «Je suis le magicien notoire, digne de mémoire ! Je n'emploie ni clysoirs, ni suspensoirs, ni fumigatoires ! O vous tous ! venez me voir !» (à suivre...)