Accident Le bus roulait depuis déjà deux bonnes heures et il me semble que nous n?étions plus qu?à 50 ou 60 kilomètres de notre destination finale, Guemmar. La plupart des voyageurs donnaient des signes évidents de fatigue, certains dormaient. Il faut dire que le soleil tapait si fort à ce moment-là de la journée, qu?on avait l?impression que des vapeurs se dégageaient du macadam liquéfié. Le véhicule était sur le point de négocier un virage particulièrement prononcé lorsque, brusquement, le vieux chauffeur marmonna quelque chose avant d?appuyer de toutes ses forces sur le frein. L?arrêt fut si brutal que les passagers, ceux de l?avant du bus surtout, sentirent la secousse. Ne comprenant pas ce qui se passait, ces derniers étaient étonnés de cette halte impromptue. Prenant un air grave, le chauffeur demanda alors au convoyeur d?aller voir ce qui se passait en bas et de vérifier si l?homme allongé sur la chaussée n?avait rien de grave. Le convoyeur n?était pas encore descendu du bus que le vieux chauffeur s?affaissa sur son volant. Je fus le premier à m?extirper de mon siège et à accourir à son secours. Quelle ne fut ma surprise lorsque je vis ses yeux révulsés. L?homme ne respirait déjà plus. Il était mort... Intervenant à son tour, le convoyeur affolé m?apprit qu?il n?y avait personne en bas, pas âme qui vive ni sur la chaussée ni sur le bas-côté de la route !... Le chauffeur avait dû avoir une vision.» Cette histoire est rapportée par un habitant d?El-Oued. Il affirme l?avoir vécue le 17 juin 1986. Pour lui comme pour ceux qui voyageaient avec lui ce jour-là, le bus avait miraculeusement échappé à un accident grave. Nul ne peut dire aujourd?hui ce qui aurait pu arriver si le défunt chauffeur n?avait pas eu un étrange, mais salutaire comportement, pour ses passagers, avant de rendre l?âme. Des faits inexplicables, dont certains ont eu des conséquences dramatiques, sont racontés par les habitants de la région d?El-Oued au sujet de ce tronçon routier maudit ; des accidents de la circulation s?y produiraient fréquemment à un endroit particulier, le jour notamment. Les circonstances des sinistres ne seraient pas du tout évidentes du fait de la parfaite visibilité qui caractérise cette partie de la route mais surtout de l?absence de virages ou de déclivités qui pourraient provoquer des dérapages. On dit que des accidents en apparence sans gravité se révèlent meurtriers à certaines périodes de l?année ou encore que de véritables catastrophes se soldent par des dégâts matériels, sans plus. En l?absence de statistiques en matière d?accidents dans cette zone précise, il est impossible de vérifier le bien-fondé de ces rumeurs. Ce qui est sûr, c?est que les usagers de la route et les chauffeurs de taxi en particulier ont une peur bleue de ce tronçon et ils l?avouent volontiers, affirme-t-on. Ils l?auraient même baptisé : Tunnel de la mort.