C'est maintenant un comportement consacré. Malgré les maintes et tout aussi vaines campagnes de lutte contre la bureaucratie, les administrés et autres usagers sont devenus, au fil des ans et l'impunité aidant, les souffre-douleur d'une administration tatillonne, tracassière, voire sadique à l'extrême. Parfois, ces travers ne sont même pas structurels, mais sont le fait d'employés qui semblent trouver une jouissance à tourmenter ces citoyens qu'ils doivent servir. C'est le cas au service de l'état civil du tribunal d'Hussein Dey. Cela fait maintenant des semaines que des citoyens se plaignent d'être traités par-dessus la jambe, en ce sens qu?ils sont invités à repasser à chaque fois qu'ils se présentent à ce service. Les journées de réception ? le samedi et le mardi ? servent à renvoyer aux calendes grecques ces éternels gogos. Une dame, venant de Sétif, a dû faire le voyage plusieurs fois, avec toutes les contraintes que l'on imagine pour récupérer un document de rectification de son état civil. De guerre lasse, son époux se présente, décidé à comprendre ce qui se passe. Quelle ne fut sa surprise lorsqu'il lui a été répondu que l'employé qui s'occupait du dossier a fait le pont pour prolonger son congé et que celui qui le remplace est sorti. Il faillit suffoquer devant tant d'inconséquence et demanda à voir le procureur. On lui rétorqua que ce n'était pas son jour de réception et qu?il fallait donc qu?il prenne son mal en patience et, de ce fait, une chambre d'hôtel pour plusieurs jours et qu'il abandonne son travail à Sétif juste pour une réclamation. Des employés charitables, touchés par son cas et dont ce n'était pourtant pas le travail, se dévouèrent malgré tout et essayèrent de lui trouver des traces du dossier de son épouse. Ils furent tous bien étonnés de découvrir que ledit dossier (n°761) n'avait même pas été traité et ce, à l'instar de beaucoup d'autres.