«Ton amour me rend fou/Et enflamme ma musique/Oh petit oiseau blanc/Reviens dans mon nid.» Corps ondulant au rythme des synthétiseurs, sourire charmeur, public conquis : cette semaine encore, Siar Walizada restera en course dans l'Afghan Star, la Star Academy afghane. La scène, impensable il y a quelques années sous les taliban qui avaient banni musique et télévision des foyers, se déroule à la mi-décembre dans une salle de cinéma à Kaboul. Sur la scène, 12 jeunes Afghans, dix garçons et deux filles de 18 à 24 ans, s'y produisent devant quatre juges, une centaine de proches et des caméras qui enregistrent le «prime time» vedette du vendredi suivant sur Tolo TV, la première chaîne de télévision afghane. Statiques ou expressifs, ils reprennent les mélodies d'amour euphoriques ou désenchantées des chanteurs populaires des années 1960, 1970 et 1980, chassés par la guerre et le régime des taliban. «On savait qu'il y avait une demande. Les guerres de ces 15 dernières années avaient laissé un trou, que nous voulons combler», explique une des productrices. «Mais le succès a été au-delà de nos espérances.» Début octobre, plus de 1 000 Afghans, jeunes et urbains, se sont pressés aux auditions à Kaboul, Hérat, Jalalabad et même Kandahar, berceau des taliban, ces grandes villes où une petite partie de la population échappe à la pauvreté et à l'analphabétisme. A l'évocation de ces auditions de deux minutes, le présentateur de l'émission, âgé de 25 ans, éclate encore de rire. «Il y en avait de vraiment mauvais, j'étais mort de rire, les cameramen aussi, l'image tremblait. Par la suite, à mesure que les juges éliminaient des candidats, il a fallu faire des ajustements, donner un côté plus pro.» Tolo TV a ainsi dû «afghaniser» quelque peu son show avec des tenues très sages, notamment pour les filles, qui portent le voile, et le policer en écartant un jeune juge aux commentaires trop cinglants. «Certains n'ont pas apprécié et sont partis. On l'a donc enlevé», raconte le présentateur.