Portrait n Actuellement, il travaille dans un quotidien en tant que chauffeur, mais avant d?arriver à cette relative stabilité, Hocine était, des années durant, clandestin. Belda, comme il aime à se définir, Hocine est de Belcourt, avec cet esprit qui caractérise les enfants des quartiers populaires d?Alger, portant en eux les valeurs ancestrales des Algérois telles la générosité, la solidarité. «Je ne peux pas refuser à un voisin qui me demande de l?emmener à l?hôpital», lance-t-il en guise d?introduction, affichant ainsi son ancrage populaire. Agé de 49 ans, père de trois enfants, il s?acharne au quotidien pour «satisfaire leurs besoins», surtout que sa femme souffre d?hypertension. «C?est le besoin qui pousse les gens à devenir clandestins», dit-il, regardant avec regret dans le rétroviseur. Il pousse un soupir, puis d?un seul coup, il vomit son amertume : «J?étais très bien à El- Moudjahid. Je travaillais au service technique depuis 20 ans. Mais en 1997, on nous a proposé le départ volontaire. J?ai sauté sur l?occasion en faisant un mauvais calcul.» «J?avais déjà préparé mon projet qui consistait à être "taxieur".» Donc tout était tracé pour Hocine, qui croyait, en sortant de l?entreprise avec un petit pécule, qu?il allait pouvoir acheter un véhicule tout en ayant un permis de place nécessaire à l?exercice de la profession. Mais les années passent, ni permis de place ni emploi ailleurs. Le petit pécule diminue de jour en jour. «C?est mon épouse qui m?a encouragé, elle m?a donné ses bijoux et, avec la petite somme d?argent que j?avais, j?ai décidé d?acheter un véhicule.» Hocine s?arrête un instant, submergé par tant de souvenirs. «J?ai passé de très mauvais moments», avoue-t-il. L?angoisse du quotidien, l?avenir incertain pour les enfants, ont été le lot de ce bon vivant qui, entre-temps, n?a pas cessé de maigrir. La solution ne se discute plus, il entre à son tour dans le cercle des clandestins. Au début, c?étaient ses voisins qui le sollicitaient pour de petits déplacements, puis les grands déplacements, enfin, le stationnement au quotidien dans les coins d?Alger à la recherche d?éventuels clients. Mais il tient à préciser : «Je n?ai jamais pris d?argent lorsqu?il s'agissait de conduire quelqu?un à l?hôpital.» Interrogé sur ses bons souvenirs, son visage s?illumine : «Ce sont les déplacements avec mon équipe favorite, le Mouloudia d?Alger.» Hocine emmène des jeunes au stade, il effectue de longs déplacements avec eux et parfois, il prend gratuitement les supporters, allant jusqu?à leur offrir des boissons, «mais juste quand l?équipe gagne», conclut-il en riant.