InfoSoir : Comment peut-on expliquer la délinquance juvénile ? l Nadia Aït Zaï : La délinquance juvénile, dans notre pays, augmente et devient de plus en plus visible ; elle touche aussi bien les filles que les garçons. Cette délinquance revêt plusieurs formes. Elle commence par une fugue et se termine par une errance qui se transforme, à son tour, en acte délictueux ou en fréquentation de bandes s?adonnant à la drogue. Autrement dit, la petite délinquance devient expérimentée. Pour preuve, un enfant de 13 ans était chef d?une organisation de malfaiteurs, dont les membres étaient en majorité des adultes. Quels sont les facteurs qui ont contribué à faire évoluer ce phénomène dans notre pays ? l Les facteurs qui ont participé à l?évolution de cette nouvelle forme de délinquance sont divers et récurrents. Ils sont essentiellement liés au divorce, à la séparation des parents ou à la démission de l?un d?eux et à la pauvreté de plus en plus rampante. Il est important de signaler que certains parents démunis utilisent leurs enfants pour subvenir aux besoins de leur famille. Le Cnes avait mis aussi en évidence deux autres facteurs, à savoir la déperdition scolaire et le terrorisme. Qu?en est-il de la justice pénale relative aux mineurs ? Est-elle en mesure de les protéger ? l L?Algérie a, certes, adhéré à la Convention de la protection des droits de l?enfant, mais elle n?a pas pour autant aligné sa législation sur les dispositions prévues par ce texte international. Ce qui manque à l?Algérie, malgré le dispositif juridique très protecteur à l?égard de l?enfant, ce sont les mécanismes de prise en charge des mineurs en difficulté. Par manque de moyens et de structures spécialisées, ces enfants sont contraints de se tourner vers la rue. Un enfant a besoin d?être écouté, considéré comme un citoyen à part entière. Il est temps de changer notre regard à leur égard. Qu?avez-vous à dire du rôle attribué aux centres de rééducation ? Sont-ils à même d?éviter aux délinquants mineurs la récidive ? l Les centres de rééducation doivent exister et remplir leur rôle d?éducateur. Ce qui est cependant intolérable est de voir ces centres regrouper des enfants qui n?ont commis aucune infraction avec des délinquants expérimentés. Mettre des enfants en danger moral et physique dans ce genre de centres les entraîne indéniablement vers la délinquance. Pour éviter qu?ils récidivent et leur assurer une meilleure réinsertion, ces centres ont besoin d?être dotés de programmes adaptés et bien étudiés. L?ordonnance 76 portant création de ces centres dégage, d?ailleurs, une mission très approfondie qui permet une meilleure réinsertion si son contenu est appliqué à la lettre. (*) Avocate et présidente du Centre de documentation sur les droits de l?enfant et de la femme (Ciddef).