Rappel n Le monde moderne a connu, lui aussi, ses vampires. Si les générations qui nous ont précédés ont tremblé à l?évocation de Dracula ou des goules des traditions orientales, tueurs en série et buveurs de sang, le monde moderne n?a rien à lui envier : il a eu aussi ses monstres, assassins, vampires et même anthropophages. Sans procéder à un relevé exhaustif de tous les monstres assoiffés de sang qui ont écumé le monde pendant les cent dernières années, nous allons en évoquer les figures les plus marquantes et tenter, à la fin, en tenant compte des recherches médicales et psychologiques entreprises dans le domaine, d?expliquer le phénomène. Si la Transylvanie a été longtemps la terre d?élection des vampires classiques, à commencer par Dracula, c?est l?Allemagne qui a fourni, au cours du siècle dernier, les vampires les plus célèbres. Il faut dire que l?Allemagne, ruinée par la Première Guerre mondiale et humiliée par les traités que lui ont imposés les vainqueurs, a vécu dans le désarroi et les privations. Le pays a perdu toutes ses colonies, mais aussi de nombreux territoires en Europe : l?Alsace et la Lorraine, retournées à la France, les territoires de Posnanie et de Prusse cédés à la Tchécoslovaquie, la Haute Silésie remise à la Pologne, etc. La superficie du pays est passée de 550 000 km2 à un peu plus de 450 000 km2, tandis que la population, en dépit de la baisse du taux de natalité, est passée de 57 millions d?habitants en 1920 à 62,4 en 1930. Le chômage, aggravé par la crise économique mondiale, va pousser des milliers de personnes à quitter la campagne pour se réfugier dans les villes, qui deviennent rapidement surpeuplées. En 1920, Berlin dépasse 4 millions d?habitants, tandis que Hambourg va en abriter, en 1930, plus de 1,5 million. La plupart des villes industrielles, comme Cologne, Munich, Frankfurt, Düsseldorf ou Leipzig ont chacune plus d?un demi-million d?âmes ! La crise a ruiné la classe moyenne et partout, ce ne sont que de longues files de chômeurs devant les bureaux d?emploi. Au mois de novembre 1922, un dollar américain est coté 9 000 marks ; l?année suivante, il vaut 1 milliard ! Quand ils veulent faire leur marché, les gens emmènent leurs billets dans des paniers. La monnaie allemande ne vaut plus rien ! Le marché noir et les affairistes sévissent et, quand l?économie se redressera, à partir de 1925, elle ne profitera pas beaucoup à la classe ouvrière. L?instauration de la République ? la fameuse République de Weimar ? va apporter une nette amélioration des salaires, une diminution du temps de travail, mais la situation reste encore précaire pour beaucoup. La pauvreté et l?incertitude dans lesquelles se débat le pays va pousser une partie importante des Allemands vers le national-socialisme, une idéologie extrémiste, qui apparaît, devant l?échec des partis traditionnels, comme la social-démocratie ou le communisme, à sauver l?Allemagne. La suite, on la connaît : arrivée d?Hitler au pouvoir par les urnes, suppression progressive des libertés, puis déclaration d?une guerre qui va durer sept années, entraînant, tant du côté allemand que de celui de ses adversaires, des millions de morts, et aboutissant à une reconfiguration politique et géostratégique du monde. C?est dans ce contexte trouble qu?apparaissent les «vampires allemands», en fait des psychotiques qui vont s?illustrer par des crimes qui défraient la chronique... (à suivre...)