Chant n La salle Ibn Zeydoun a abrité, jeudi, un récital de vocalique du groupe Segue me a capella. C'était un récital de chants exceptionnel mené avec une incarnation vocalique saisissante par Segue me a capella, des voix de femmes surgissant des profondeurs du Portugal – d'un terroir séculaire riche en accents – pour venir à l'ouïe et lui conter dans un rituel ancestral les temps anciens. Ces chants populaires qu'avaient interprétés ces femmes – et qui sont au nombre de sept – sont des récits de vécu : chacune raconte une manière de faire. Ce sont des chants de travail que les femmes chantaient, autrefois, dans les champs, pendant les heures de travail : des chansons de labourages. Il y avait également des chansons interprétées par les bergères. En somme, ce sont des chants champêtres qui, évoquant joliment des ambiances de travail et de fête, ont égayé l'assistance et l'ont plongée dans une ambiance rustique, aux couleurs ensoleillées et aux saveurs bucoliques. Ces chants traditionnels étaient occasionnellement accompagnés par des percussions leur conférant ainsi une résonance percutante. Ces instruments font également office d'amplificateur du rôle de la voix, le plus ancien instrument de musique au service de l'homme, en renforçant les moments, qu'ils soient dramatiques ou fêtards. La percussion la plus utilisée est le «adufe» l'égal du «bendir», sauf que celui utilisé au Portugal est de configuration carrée. Mais il est utilisé – et tenu – de la même manière que chez nous, et il a pratiquement le même son, le même retentissement mélodique. Outre l'aspect pastoral de ces chants, des représentations populaires de ce que fut la vie dans les champs, une vie de travail tout en gaieté et en mélodies, Segue me a capella a aussi interprété des chants à caractère religieux immergeant ainsi le public dans un autre univers, celui du sacré, un univers serein et rituel. Dans ces chants authentiques et à l'identité méditerranéenne, des chants enracinés dans un creuset culturel multidimensionnel, le public a pu reconnaître en chacun un air de chez lui. Ces voix venues du Portugal nous rappellent, ne serait-ce que par quelques intonations, celles qui s'élèvent très haut jusqu'aux cimes des monts du Djurdjura. Il y a en effet des similitudes dans l'exécution des voix, une ressemblance assez frappante. Cela revient d'emblée à dire que la Méditerranée est un espace où se mêlent, se tissent des voix issues des différentes rives, aussi bien celles du Sud que celles du Nord. Ainsi la Méditerranée s'exprime dans sa grandeur, sa richesse et sa pluralité, au-delà du temps et des frontières.