Débat n Une rencontre portant sur le thème de «Question de l'affirmation d'une culture nationale au lendemain de la Seconde Guerre mondiale» a eu lieu, hier, mardi, à la Bibliothèque nationale. Dirigée par Mme Nadjet Khadda, cette rencontre tente de circonscrire les impulsions des conditions de l'émergence d'artistes, à l'instar de Mohammed Khadda (peintre), de Mohammed Dib (romancier) et de Bachir Hadj Ali (poète musicien), qui, à travers leur création, ont œuvré à l'édification d'une culture de la différenciation, donc de l'affirmation de soi. La décennie 1945-1954 se veut, selon Mme Nadjet Khadda, décisive, comportant autant d'espoirs que de pièges, c'est une génération de création artistique et de foisonnement intellectuel. C'est une période significative puisqu'on assiste à la naissance d'artistes et d'écrivains qui, tous, allaient prôner l'affirmation de l'identité et la personnalité algérienne. L'objectif, selon l'intervenante, consiste à s'interroger d'une manière interdisciplinaire sur cette date-là. «Nous n'avons pas la prétention d'apporter des réponses à nos interrogations, mais nous cherchons seulement à poser des questions en vue d'avoir une matière première nous permettant d'approfondir la réflexion relative à cette génération-là», explique-t-elle. Omar Carlier, historien, souligne que la période s'étendant de 1945 (au lendemain de la fin de la Seconde Guerre mondiale) à 1954 (la veille de la Guerre de Libération nationale) a connu une reconfiguration de l'espace socioculturel de la création. L'on assistait à «une construction de soi», explique-t-il. Et d'ajouter : «C'était une génération de la culture de rupture, où le même et l'autre s'inscrivaient dans une relation dialogique. L'Algérie s'est révélée (à elle-même) dans un autre espace/temps : un nouveau rapport à soi, à l'autre s'était établi.» Ainsi, l'espace est restructuré, car le temps a changé : l'histoire a pris un autre tournant ; une nouvelle page allait s'écrire ; de nouvelles idées allaient se mettre en place réorganisant ainsi le rapport à soi et à l'autre. C'est une autre vision qui allait prendre forme et devenir une référence de création artistique et de production intellectuelle. L'on était d'emblée dans la culture dite nationale, une culture qui allait fonctionner par différence et par opposition à la culture de l'autre. Ali El-Kenz, sociologue, a, pour sa part, insisté sur l'absence totale d'une histoire de l'esthétique et de la culture, une absence qui s'est faite au profit d'une histoire du politique. Or, pour lui, ce sont les artistes qui avaient affiché des prises de positions en faveur de l'Algérie et ce, à travers leur production culturelle. Quant à Jean-Robert Henri, historien et sociologue, il a rappelé que la génération 1945-1954 représente une période à la fois dramatique et féconde. L'on assistait à une forte prise de parole algérienne et cela à travers la création culturelle dans ses différents aspects, à l'instar de la peinture et de la littérature… Il est à souligner qu'une exposition d'affiches réalisées par le défunt peintre Mohammed Khadda a été organisée en marge de cette rencontre qui se poursuit aujourd'hui.