Patrimoine n Qui n'a pas été charmé, un jour, par les bijoux dont se parent les femmes de Kabylie ? Broches, colliers, bagues, anneaux, boucles d'oreilles… réalisés avec de l'argent serti de corail, rehaussent agréablement les robes aux couleurs flamboyantes des femmes du Djurdjura. Le bijou kabyle a résisté a l'évolution du temps et aux influences des modes et des cultures, préservant son identité qui lui vaut aujourd'hui sa renommée qui a dépassé les frontières de notre pays. Et c'est à ce propos qu'un vibrant hommage doit être rendu à ceux qui l'ont perpétué de génération en génération pour nous faire encore profiter de sa beauté, en l'occurrence les artisans bijoutiers et plus particulièrement ceux d'une petite localité perchée sur les montagnes du Djurdjura : Ath Yenni. En dépit des rudes moments par lesquels passent les métiers de l'artisanat dans notre pays ces dernières années, ils ont résisté, par amour pour l'art de leurs aïeux, devenant, par la force des choses, défenseurs du patrimoine culturel national. Il faut dire que la situation difficile que traversent les métiers de l'artisanat a poussé une grande partie des artisans à mettre la clé sous le paillasson. Aujourd'hui, les bijoutiers ne sont plus qu'une dizaine, car «ce métier ne permet plus de gagner sa vie et ceux qui continuent à l'exercer le font par passion», remarque Laârbi, un jeune artisan d'Ath Yenni. Il faut dire que les contraintes ne manquent pas dans ce métier. La matière première, à savoir le corail et l'argent, coûte excessivement cher. Soucieux de préserver l'originalité et la marque de leurs œuvres, les bijoutiers restent intransigeants sur la qualité de l'argent et refusent de céder à l'option de remplacer le précieux corail par des décorations en plastique rouge. «Remplacer le corail par du plastique serait ôter son âme au bijou kabyle. Certains l'ont fait, ce qui a permis de réduire un peu les prix, mais ces bijoux ne se vendent pas», poursuit notre interlocuteur. Pour ce dernier, la fête du bijou organisée annuellement à Ath Yenni (dont l'édition de cette année vient tout juste d'être clôturée) est une occasion de vente inespérée pour les artisans. «Les émigrés et les étrangers sont nos principaux clients. Il ne faut pas oublier les mariées, qui comptent toujours une parure en argent parmi leurs bijoux», ajoute Laârbi. De ce fait l'été est la période propice pour la vente, et la fête du bijou est là pour réunir artisans et acheteurs. Cette année, l'on est loin des 10 000 visiteurs attendus ; cependant, près de 1 500 s'y sont rendus, dont de nombreux étrangers, qui ont permis aux bijoutiers d'écouler un peu de leurs marchandises. De nombreux visiteurs sont revenus bredouilles d'Ath Yenni, car, selon eux, les prix affichés sont excessivement élevés. «Les prix sont plus raisonnables dans les boutiques que sur les stands de la fête», témoigne, à ce propos, Célina. Notons enfin que pas moins de 60 artisans se sont inscrits au registre de l'artisanat pendant la fête, apprend-on des organisateurs.