Résumé de la 158e partie n Il paie le prix fort pour son insouciance. Jeté à la rue, Aziz ne trouve que la chaleur et la douceur de sa mère. Le malheur n'en finit pas : son père est mort durant son absence. Le matin, ma mère me força à me relever et s'assit à côté de moi ; mais je restai cloué sur place, à regarder le coin où avait l'habitude de s'asseoir ma pauvre Aziza, et les larmes coulaient silencieuses sur mes joues ; et ma mère me dit : «Ah ! mon fils, voilà dix jours déjà que je suis seule dans la maison vide de son maître, dix jours que ton père est mort dans la miséricorde d'Allah !» Je dis : «O mère, laisse cela ! Pour le moment je suis tout entier plein de la pensée de la pauvre Aziza ; et je ne saurais consacrer ma douleur à d'autres souvenirs que les siens. Ah pauvre Aziza si délaissée par moi, toi qui m'aimais vraiment, pardonne au misérable qui t'a torturée, maintenant qu'il est puni, et au-delà, de ses fautes et de ses trahisons !» Or, ma mère remarquait l'étendue et la vérité de ma douleur, mais elle se taisait ; pour le moment. Elle se hâta de panser mes blessures et de m'apporter de quoi restaurer mes forces. Puis, ces soins une fois donnés, elle continua à me prodiguer les marques de sa tendresse et à veiller à mes côtés en me disant : «Qu'Allah soit béni, mon enfant, de ce que de pires calamités ne te soient pas arrivées, et que tu aies la vie sauve !», et cela jusqu'à ce que je fusse complètement rétabli, tout en restant malade de mon âme et de mes souvenirs. Alors ma mère, un jour, après notre repas, vint s'asseoir à côté de moi et me dit d'un ton pénétré : «Mon fils, je juge que pour moi le temps est venu de te remettre le souvenir d'adieu que m'avait confié à ton intention la pauvre Aziza : avant de mourir, elle m'a fait la recommandation de ne te le donner que lorsque j'aurais constaté chez toi de véritables marques de son deuil et vérifié que tu as définitivement délaissé les liens illégitimes où tu étais pris !» Puis elle ouvrit un coffre et en tira un paquet, qu'elle défit pour y prendre l'étoffe précieuse sur laquelle est brodée la seconde gazelle que tu as devant tes yeux, prince Diadème ! Et tu vois ces vers qui s'y entrelacent en bordure : «De ton désir tu as rempli mon cœur pour t'asseoir dessus et le broyer ; mes yeux, tu les as habitués aux veilles pour toi-même t'endormir ! «Sous mes yeux et au bruit des battements de mon cœur, tu eus des rêves étrangers à mon amour, alors que mon cœur et mes yeux fondaient de ton désir ! «Mes sœurs, par Allah ! après ma mort, inscrivez sur le marbre de mon tombeau : ”O toi qui passes sur le chemin d'Allah, voici la terre où repose enfin une esclave de l'amour !”» Alors moi, seigneur, à la lecture de ces strophes, je pleurai d'abondantes larmes et me frappai les joues de douleur et, en déroulant l'étoffe, je laissai tomber une feuille de papier sur laquelle ces lignes étaient tracées de la main même d'Aziza... A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut. Le soir venu, elle reprit son récit. Elle dit : En déroulant l'étoffe, je laissai tomber une feuille de papier sur laquelle ces lignes étaient tracées de la main même d'Aziza : «O mon cousin bien-aimé, sache bien que tu me fus plus cher et plus précieux que mon propre sang et ma vie. Aussi, après ma mort je continuerai à supplier Allah de te faire prospérer et réussir auprès de toutes celles que tu auras élues. Je sais que des malheurs t'atteindront du fait de la fille de Dalila-la-Rouée ! Qu'ils te servent de leçon et puisses-tu extirper de ton cœur l'amour néfaste des femmes perfides et apprendre à ne plus t'attacher ! Et béni soit Allah qui m'a enlevée la première pour ne pas m'obliger à être le témoin douloureux de tes souffrances. (à suivre...)