Résumé de la 7e partie n Le vieux cheikh du souk est envoûté par les deux jeunes hommes… Le cheikh du souk dit : «Certes, par Allah ! Aussi que de poèmes admirables le hammam n'a-t-il pas inspirés aux grands poètes ! N'en connaissez-vous point quelques-uns ?» Diadème, le premier, s'écria : «Si j'en connais ? Ecoutez ceux-ci : ”Vie du hammam, ta douceur est merveilleuse ! O hammam, ta durée est si brève ! Et que ne puis-je, dans ton sein, écouler ma vie toute ! Hammam admirable, hammam de mes sens ! Quand tu existes, le Paradis lui-même devient exécrable ; et si tu étais l'Enfer, je m'y précipiterais, avec quel bonheur !”» Lorsque Diadème eut récité ce poème, Aziz s'écria : «Moi aussi je sais des vers sur le hammam !» Le cheikh du souk dit : «Réjouis-en notre goût !» Aziz récita rythmiquement : «C'est une demeure qui a pris aux roches fleuries leurs broderies. Sa chaleur te le ferait prendre pour une bouche d'enfer, si bientôt tu n'en éprouvais les délices, et si tu ne voyais en son milieu tant de lunes et de soleils !» Lorsqu'il eut fini cette strophe, Aziz s'assit à côté de Diadème. Alors le cheikh du souk fut extrêmement émerveillé de leur gentillesse et de leur talent et s'écria : «Par Allah ! vous avez su unir en vous l'éloquence et la beauté ! Laissez-moi maintenant vous dire à mon tour quelques vers délicieux. Ou plutôt, je vais vous les chanter, car nos chants seuls peuvent rendre la beauté de ces rythmes !» Et le cheikh du souk appuya sa main contre sa joue, ferma les yeux à demi, dodelina de la tête et chanta avec mélodie : «Feu du hammam, ta chaleur est notre vie. O feu, tu rends la force à nos corps ; et nos âmes par toi s'allègent et se refont. «O hammam, mon ami ! Ah ! tiédeur d'air, fraîcheur de bassins, bruit d'eau, lumière de haut, marbres purs, salles d'ombre, odeurs d'encens et de corps parfumés, je vous adore ! «Tu brûles sans cesse d'une flamme qui jamais ne s'éteint, et tu restes frais à la surface et plein de ténèbres douces ! Tu es sombre, hammam, malgré le feu, comme mon âme et mes désirs. O hammam !» Puis il regarda les adolescents, laissa un instant son âme vagabonder dans le jardin de leur beauté et, s'en étant inspiré, il récita ces deux strophes à leur intention : «J'allai à leur demeure, et, dès la porte, je fus reçu d'un visage gentil et d'un œil plein de sourires. Je goûtai toutes les délices de leur hospitalité et sentis la douceur de leur feu ! Comment ne serais-je pas l'esclave de leurs charmes !» A l'audition de ces vers et de ce chant, ils furent extrêmement charmés et émerveillés de l'art du cheikh. Aussi le remercièrent-ils avec effusion et, comme le soir tombait, ils l'accompagnèrent jusqu'à la porte du hammam et, bien qu'il eût beaucoup insisté auprès d'eux pour leur faire accepter son invitation à un repas dans sa maison, ils s'excusèrent et, ayant pris congé de lui, ils s'éloignèrent, tandis que le vieux cheikh s'immobilisait à les regarder encore. Ils rentrèrent donc chez eux où ils mangèrent et burent et se couchèrent ensemble dans un bonheur parfait, jusqu'au matin. Alors ils se levèrent, firent leurs ablutions et remplirent le devoir de la prière ; puis, à l'ouverture des portes du souk, ils se dirigèrent vers leur boutique qu'ils ouvrirent pour la première fois. Or, les serviteurs avaient bien arrangé la boutique, car ils avaient du goût, et l'avaient tendue de draperies de soie et avaient placé à l'endroit qu'il fallait deux tapis royaux, qui pouvaient valoir chacun mille dinars, et deux coussins bordés de filets et brodés d'or, qui pouvaient valoir chacun cent dinars. Et sur les étagères d'ivoire, d'ébène et de cristal étaient rangées en bon ordre les marchandises de prix et les trésors inestimables. (à suivre...)