Lien n Ils trouvent leur bonheur chez ces bouquinistes à la sauvette, qui leur offrent leurs livres à des prix abordables. Au fil des ans, de forts liens sont tissés entre les vendeurs et les lecteurs. «Je réserve pratiquement mille dinars par mois à l'achat de livres», déclare Siham, journaliste. Pour elle, le choix des bouquinistes contrairement aux librairies, est dicté par les prix accessibles qu'ils pratiquent. «Au lieu d'acheter un seul livre chez un libraire pour mille dinars, je préfère en acheter une dizaine, en bon état.» D'autant plus qu'«un grand choix est proposé», ajoute-t-elle. Croquant tout ce qui touche au domaine culturel, elle lit des œuvres sur le théâtre, la sculpture, la peinture… «Ce sont des livres qu'on ne trouve pas dans les librairies», explique-t-elle. Abdelkrim, qui prépare une licence en histoire, est un habitué des bouquinistes. «Je flâne dans les rues d'Alger tout en faisant de bons achats», explique-t-il. Etudiant sans grandes ressources, il écume les divers endroits à la recherche «des bonnes occasions». Passionné, de la revue Historia, il la collectionne. Donc il est toujours à l'affût de la moindre information pour la compléter. Toutefois, Abdelkrim avertit que certains vendeurs exagèrent en proposant des prix excessifs. «A l'Itfc où je réside, un vendeur propose des revues plus cher que leur prix réel», explique-t-il. Même si les revues qu'il propose sont intéressantes d'un point de vue contenu, elles restent inabordables, notamment pour un étudiant.» Un professeur d'université, rencontré à la rue Arezki-Hamani (ex-rue Charras), est catégorique : «Comment voulez-vous acheter des livres chez les libraires avec les prix pratiqués ?» Parlant à haute voix, comme dans un amphi, il dicte machinalement son avis : «L'essentiel est le contenu, le reste n'est qu'apparat», pour se ressaisir un instant plus tard : «Pourvu que la couverture soit en bon état.» Cet enseignant prend à témoin le bouquiniste ; celui-ci approuve avant d'entendre les propos de l'autre : «J'achète régulièrement les livres chez lui. L'avantage avec les bouquinistes, c'est qu'on peut leur demander de nous procurer un livre rare sur le marché.» Louisa, poétesse, passe des heures chez les bouquinistes, «notamment quand il fait beau», précise-t-elle, à la recherche de livres sur les poètes et leur vie ou «ce qui s'écrit sur eux comme critique». «Entrer dans une librairie est frustrant, on ne trouve que des auteurs français et puis c'est tellement cher qu'il vaut mieux ne pas s'y rendre. Avec les bouquinistes, on peut négocier…»