Prévision n Le Pentagone décrit une sombre réalité dans un rapport trimestriel publié hier. «L'inquiétude concernant une guerre civile au sein de la population irakienne et chez certains experts en sécurité a augmenté au cours des derniers mois», affirme ce document d'environ 60 pages remis au Congrès américain sur la situation dans ce pays, où sont déployés environ 138 000 soldats américains. Le document fait écho aux propos tenus, début août, par de hauts responsables militaires américains lors d'une audition au Congrès. Le chef du commandement central (Centcom), qui supervise les opérations en Irak, le général John Abizaïd, et le chef d'état-major interarmées, le général Peter Pace, avaient tous les deux estimé que l'Irak pouvait sombrer dans une guerre civile. Selon le rapport, au cours de la période des trois derniers mois se terminant début août, «le nombre d'attaques hebdomadaires a augmenté de 15%» comparé à la précédente période et «le nombre de victimes irakiennes a augmenté de 51%». «L'essentiel de cette violence a eu lieu à Bagdad», ajoute-t-il. «Depuis le dernier rapport, le cœur du conflit en Irak est devenu une bataille entre extrémistes sunnites et chiites pour prendre le contrôle de zones clés à Bagdad, créer ou protéger des enclaves confessionnelles, détourner les ressources économiques et imposer leurs propres programmes politiques et religieux», ajoute le Pentagone. «Les escadrons de la mort et les terroristes sont enfermés dans un cycle de violences confessionnelles, les extrémistes sunnites et chiites se décrivant eux-mêmes comme les défenseurs de leurs groupes respectifs», souligne-t-il. Le rapport estime, toutefois, que «l'insurrection sunnite reste forte, même si sa visibilité a été éclipsée par l'augmentation des violences confessionnelles».Le Pentagone relève également que malgré la mort du chef d'Al-Qaîda, Abou Moussab al-Zarqaoui, le réseau terroriste «reste capable de mener des opérations grâce à sa structure de commandement souple et semi-autonome». La publication de ce rapport, intitulé «Mesurer la sécurité et la stabilité en Irak», intervient alors que l'administration Bush a lancé une nouvelle campagne de défense de la mission américaine en Irak, devenue impopulaire chez de nombreux Américains. Le chef de file démocrate au Congrès, Harry Reid, a estimé que le document du Pentagone montrait que l'administration Bush était «de plus en plus déconnectée de la situation sur le terrain en Irak».La chef de file démocrate à la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a jugé, de son côté, «alarmant» le rapport. «La guerre en Irak est la mauvaise guerre, une réalité qu'aucune rhétorique de la Maison- Blanche ne peut déformer», a-t-elle estimé dans un communiqué.