Résumé de la 4e partie n Deux ans après sa première «mort», Miss Sabrina meurt pour la seconde fois. A son inhumation, on respecte ses dernières volontés. Les visiteurs se pressent dans le cimetière durant plusieurs jours, chacun prêtant une oreille attentive à un éventuel son de grelot, ou un coup de sifflet. Une curiosité morbide attire irrésistiblement le public, toute la semaine qui suit la cérémonie. Vient le deuxième dimanche après la mort indubitable de Miss Sabrina. Le gardien du cimetière, dont la maison jouxte les premières tombes, est un homme marié. Et, en tant que tel, il a deux fonctions à remplir. La surveillance de son cimetière et son devoir conjugal. La surveillance est quotidienne, diurne et nocturne, le devoir conjugal ne se remplit que le dimanche en matinée. Ce dimanche matin donc, remplissant son devoir conjugal, il se trouve dans la chambre conjugale, dont la fenêtre donne sur le cimetière. Est-ce la proximité de tous ces corps glacés pour l'éternité ? L'épouse semble glacée elle-même. Le regard fixe, exorbité, elle ne participe en aucune manière aux événements. Elle regarde devant elle le miroir de la chambre, ce dont l'époux s'inquiète avec consternation : «Hélène... tu es ailleurs...» Hélène ne répond pas. Elle fixe toujours le miroir devant elle, en silence, ce qui coupe les effets du mari et permet au gardien d'entendre comme un léger bruit de grelots. Suivant le regard effaré de sa femme il se retourne, et voit ce qu'elle voit. Dans le miroir, le reflet de la fenêtre, et par cette fenêtre, une image cauchemardesque. Une silhouette blonde, se promenant au milieu des tombes une magnifique robe de dentelle froissée... un sifflet à la bouche, une énorme cloche à la main... Le traumatisme conjugal est à la mesure de cette vision extraordinaire. Et le récit du gardien court le village, au détriment de sa vie privée, sans doute, mais pour l'édification des foules. Si le malheureux homme était le seul témoin du prodige, on eût pu croire à un fantasme particulier. Mais la chose est constatée, peu de temps après, en un lieu au-dessus de tout soupçon : l'église. A Bircher Bower, il existe une importante minorité catholique. Le dimanche suivant, après les génuflexions qui précèdent l'Elévation, l'abbé de la paroisse se retourne vers l'assemblée des fidèles, les yeux clos sur sa prière et frémit légèrement en entendant la cloche de l'enfant de chœur. Elle n'a pas le son discret habituel, le tintement solennel adéquat. C'est une cloche désordonnée, bruyante... L'abbé se promet de tancer le gamin et procède à l'Elévation du ciboire. Tous les fidèles devraient courber la tête devant le mystère du corps du Christ. Or ils la lèvent au contraire et se détournent. Un véritable sacrilège. L'abbé suit le regard de ses infidèles, droit devant lui dans l'allée centrale de la nef, et reste ainsi les bras levés, avec son ciboire, tremblant devant un tel spectacle. Dans un bruit léger de grelots, un somptueux fantôme en robe de dentelle froissée se glisse dans l'église et avance lentement, un sifflet entre les lèvres et une cloche à la main... La célébration de la messe s'en trouve considérablement perturbée. Puis le fantôme disparaît comme il est venu, par la porte semble-t-il, et le bruit de grelots s'éteint. Vivante. Miss Sabrina est vivante. Elle est rentrée chez elle, après une léthargie mystérieuse, grelottant de tous ses grelots, passablement froissée et décoiffée, mais vivante une deuxième fois. (à suivre...)