Débat n Même si les revendications de la classe politique portent dans leur ensemble sur les modalités techniques de l'organisation des opérations de vote et de dépouillement, le mode de régime électoral n'en constitue pas moins un enjeu capital pour les uns et les autres. A deux mois des élections législatives, Ahmed Ouyahia coupe court aux espoirs des défenseurs de la révision de la loi électorale. A partir de Sidi Bel Abbès où il présidait les travaux du conseil de wilaya de son parti, l'ex-chef du gouvernement a affirmé que la modification du texte interviendra avant les élections locales de l'automne prochain, excluant de fait son intervention avant le rendez-vous du 17 mai. Emanant du premier responsable d'un parti dont l'influence au sein de l'Alliance présidentielle n'est pas à démontrer, cette déclaration laisse penser que la question est tranchée en haut lieu. Les observateurs estiment que la décision n'est pas imputable uniquement à des considérations techniques et juridiques, à savoir la proximité de l'échéance et la non programmation en cette période d'une session des deux chambres du Parlement, puisque la modification de certaines clauses du texte en vigueur depuis une décennie peut intervenir, conformément aux dispositions de la loi fondamentale du pays, sur ordonnance présidentielle. Ce qui fait croire à certains que le maintien de la loi qui a présidé à l'élection de l'actuel Parlement obéit à des considérations plutôt politiques. Car, à y voir de près, même si les revendications de la classe politique portent dans leur ensemble sur les modalités techniques de l'organisation des opérations de vote et de dépouillement, avec tout ce que cela implique comme garanties pour la régularité du scrutin, le mode de régime électoral n'en constitue pas moins un enjeu capital pour les uns et les autres. En ce sens que l'issue finale dépend en grande partie du régime adopté. Le retour au scrutin uninominal à deux tour, en vigueur avant 1997, peut, en effet, s'avérer plus qu'avantageux aux grosses cylindrées qui disposent d'un réel ancrage dans certains fiefs. Le FLN, pour ne pas le citer, serait le premier gagnant d'une telle option, en ce sens que ses candidats disposent des moyens et de la stature nécessaires pour damer le pion à n'importe quel adversaire dans presque toutes les circonscriptions du pays. Ce qui lui assurerait une majorité absolue de sièges dès le premier tour. Les analystes rappellent dans ce sens, que c'est ce même régime électoral qui avait permis à l'ex-FIS, lors des législatives avortées de décembre 1991, de rafler près de la moitié des sièges mis en jeu dès le premier tour, avec une option pour le contrôle absolu du Parlement à l'issue de la deuxième manche. En l'absence du FFS en Kabylie, l'adoption du système uninominal à deux tours peut également tourner à l'avantage du RCD, en ce sens que dans la quasi-totalité des circonscriptions de la région, aucun parti, hormis la formation d'Aït Ahmed, ne peut réellement tenir tête à ses candidats. Le système de la représentation proportionnelle partielle, actuellement en vigueur, constitue aux yeux de nombreuses «petites et moyennes» formations politiques l'unique régime représentatif qui reflète réellement la volonté populaire. Dans ce sens, il est utile de rappeler que les dirigeants du Mouvement de la société pour la paix furent les premiers à afficher leur opposition au retour au système uninominal, conscients qu'ils sont des répercussions que ne manquerait pas d'avoir une telle option sur le poids politique de leur parti.