Résumé de la 5e partie n Malin qu'il est, le jars prend, avec lui, la balle dans l'étang. Les deux fillettes doivent attendre une autre occasion pour la récupérer. Le temps passe... Ce qu'il ne disait pas, c'est qu'en arrivant à l'étang, il était si dégoûté de la balle qu'il l'avait jetée à l'eau, pensant qu'elle dût aller au fond comme un simple caillou. Il avait été le premier surpris de la voir flotter, mais devant les petites, il était trop orgueilleux pour convenir de son étonnement. Delphine essaya encore une fois de le fléchir, et lui parla poliment : — Allons, jars, sois raisonnable, rends-nous la balle... nos parents vont nous gronder. — S'ils vous grondent, ce sera bien fait. Vous apprendrez ce qu'il en coûte de venir faire les têtes folles dans mon pré. Si je les rencontrais, vos parents, je leur dirais qu'ils élèvent bien mal leurs filles. Je voudrais voir quel accueil ils feraient à mes oisons, s'ils s'avisaient d'aller jouer chez eux sans leur permission. Heureusement, les chers petits savent se conduire, et c'est à moi qu'il le doivent. — Tais-toi donc, tu ne sais dire que des âneries, lui jeta Marinette en haussant les épaules. Aussitôt, elle se mordit les lèvres et regretta cette parole désobligeante pour l'âne. — Des âneries ? s'écria le jars. Insolentes ! Je vais vous arranger les mollets, moi ! Laissez-moi seulement sortir de l'eau. Il nageait déjà vers la rive, et les petites, qui portaient encore sur les jambes la trace de son bec, se sauvèrent en courant. — Ah ! vous faites bien de vous sauver, dit le jars, j'allais vous mordre jusqu'au sang ! Et quant à la balle, n'espérez pas la revoir jamais. J'ai pensé pour elle à une fameuse cachette ! Bien fin qui saura la trouver. Les petites rentrèrent chez elles sans oser passer auprès de l'âne, car Marinette songeait avec remords au mot malheureux qui venait de lui échapper. D'ailleurs, le temps avait brusquement changé et il faisait très froid. Le ciel était sans nuages, il soufflait du nord un vent glacial qui pinçait les jambes. Delphine et Marinette s'attendaient à être grondées, mais les parents ne prirent pas garde qu'elles rentraient sans leur balle. — On n'a jamais vu un froid pareil à cette saison, disait le père. Je suis sûr que cette nuit il va geler à pierre fendre. — Heureusement, disait la mère, ces froids-là ne dureront pas. Il est trop tôt. En quittant l'étang, le jars et sa famille repassèrent devant la clôture de l'âne. La mère l'oie portait dans son bec la balle des petites, et les oisons se plaignaient à leur père qu'il fît un peu frais. — Ah ! ah ! je vois qu'on n'a pas voulu rendre la balle dit l'âne. Mais j'espère que ce sera pour demain. — Ni pour demain ni pour après-demain, riposta le jars. Je la garde et je vais, de ce pas, la mettre en lieu sûr, dans une cachette de ma façon. — Les cachettes d'un jars, ça ne doit pas valoir grand-chose. — En tout cas, ce n'est pas un bourricot de ton espèce qui saura trouver la mienne ! — Peuh ! répondit l'âne, je ne prendrai même pas la peine de chercher... je saurai bien te faire rendre la balle sans me déranger ! — Je serais curieux de voir ça, ricana le jars. (à suivre...)