Stratégie n Pour ce spécialiste de la sûreté industrielle, les sociétés algériennes doivent faire de la gestion des risques une priorité absolue. InfoSoir : Avez-vous eu des contacts avec des entreprises algériennes ? Jean-Pierre Pochon : «Nous avons eu effectivement des contacts, en collaboration avec la Chambre Française du commerce et de l'industrie en Algérie (Cfcia), avec des entreprises algériennes et des organismes d'Etat pour évoquer en débat le problème récurrent de la sûreté et la sécurité des sites industriels. Nous souhaitons faire part de notre expertise et notre savoir-faire dans ce domaine qui relève de l'engineering . Je pense que ce séminaire sur la sécurité industrielle est une occasion qui tombe à pic pour faire part légitimement de notre compétence en la matière. Quels sont les secteurs industriels dans lesquels vous activez ? Notre champ d'action concerne tous les domaines où le risque industriel est potentiellement présent. Je cite comme exemple le domaine énergétique et les autres domaines industriels aussi. Même le secteur du tourisme et le secteur de la culture peuvent être concernés . Sur ce plan, je vous cite un exemple. En France, nous sommes associés dans l'édification d'un musée Louvre à Lens, tout près du stade Bollard. Dans ce projet, notre tâche consiste à anticiper sur les potentiels risques qui peuvent survenir lorsqu'un musée est construit à quelques mètres seulement d'un stade réputé pour ses grandes influences et ses marées humaines les jours des matches. Est-il possible de «copier» ce qui se fait là-bas pour le faire ici ? Il est tout à fait possible de procéder au transfert des expertises faites dans les pays développés vers des pays émergents comme l'Algérie. La sûreté et la sécurité dans et autour des sites industriels normalement selon des normes internationales standards. Il ne devrait pas y avoir une spécificité française ou une spécificité algérienne. Les normes de travail sont les mêmes et les risques sont aussi les mêmes. Ce qui diffère en revanche, c'est la topologie des implantations et par extension la topologie des risques. Comment fait-on l'audit ? Si un client veut faire un audit, nous procédons à des études approfondies en prenant en ligne de compte les coûts, la sécurité, l'impact sur l'environnement et une fois l'étude achevée, on transmet au patron de l'entreprise un dossier avec une série de remarques et de préconisation et charge à lui d'en tenir compte ou pas. Il faut dire que si une entreprise prend en charge les recommandations des experts en matière de sûreté et de sécurité, elle a de fortes chances d'avoir une image positive auprès des assureurs. Par contre, si un accident venait à intervenir, une entreprise qui présente des défauts de sécurité ne peut en aucun cas transférer la responsabilité sur l'assureur. Celui-ci va se retourner, le cas échéant, vers l'entreprise pour lui signifier une fin de non recevoir parce que tout simplement les mesures de sécurité n'ont pas été prises au préalable. Donc, en tant d'experts, nous proposons aux sociétés algériennes d'apporter un certain éclairage sans aucune prétention particulière. Nous avons déjà fait des études d'évaluation au profit des entreprises algériennes avec l'élaboration de cartographie des risques. La démarche que nous menons aujourd'hui, c'est de se faire connaître et de faire connaître les problèmes de sûreté et de sécurité. (*) Expert international en sécurité et stratégie industrielle l La zone côtière est la zone où les deux tiers des installations industrielles en Algérie sont localisées. Plus de 3 900 sites «à risques potentiels et à risques modérés» sont implantés dans la région du Centre (Alger, Béjaïa), de l'Est (Skikda et Annaba) et l'Ouest (Arzew). En somme, 74% des sites industriels sont concentrés sur une petite parcelle du territoire où curieusement est concentrée la majorité de la population algérienne. «Les industries du gaz, du pétrole, de la mécanique, des produits pharmaceutiques, de l'industrie des pesticides et des engrais constituent des industries potentiellement à risques de par les accidents et les émanations des produits dangereux», selon un récent rapport du ministère de l'Environnement. Que ce soit pour l'homme ou pour l'environnement, les dangers peuvent se manifester sous forme d'incendies, d'explosions en milieu industriel et urbain, d'émissions de gaz toxique ou déversements de produits dangereux. D'où l'éminence d'une bonne identification et une classification de toutes les activités à risque. Les engrais et fertilisants, la production de chlore et la production d'électricité, le raffinage de pétrole, La liquéfaction du gaz naturel, le stockage du pétrole, la production de gaz industriels, le traitement de minerai, la production de chlore, l'enfûtage de gaz et la production d'électricité sont les neuf activités industrielles à risques en Algérie.