Condamnation n Au bout du couloir, la chaise électrique. Dignes, les deux condamnés le seront jusqu'à l'ultime souffle de leur vie. Malgré la formidable mobilisation dans le monde, le président des Etats-Unis a refusé la grâce aux deux condamnés. Il est près de minuit, ce 22 août 1927, à la prison de Charlestown, dans le Massachusetts, aux Etats-Unis d'Amérique. Voilà une demi-heure à peu près que la décision du gouverneur de l'Etat est tombée : la grâce leur a été refusée et ce, malgré les dizaines de manifestations qui, jusqu'à cette heure tardive de la nuit, ont été organisées dans tout le pays, malgré la formidable mobilisation dans le monde contre l'exécution de Nicolas Sacco et Bartolomé Vanzetti… C'est le directeur de la prison lui-même qui va chercher les deux hommes dans le quartier des condamnés. C'est Sacco qui est conduit le premier dans la chambre des exécutions. — Monsieur Sacco, commence le directeur très ému. — Je sais, monsieur le directeur, répond le jeune homme, très pâle, je sais… L'heure est venue, mais je veux qu'à ce moment où l'on va m'ôter la vie, je veux que vous sachiez que je suis innocent ! Le directeur est accompagné de deux gardes, sans doute sont-ils chargés de conduire le condamné au supplice au cas où il refuserait de s'y rendre, mais Sacco se montre coopératif. — Je vous suis, monsieur le directeur ! Il n'y a que quelques mètres entre la cellule et la chambre où se trouve la chaise électrique, mais ces quelques mètres paraissent des kilomètres. On arrive devant la chambre. — C'est là ? demande Sacco. — Oui, dit le directeur très ému. Sacco entre le premier. Il y a quelques hommes, ceux que la loi autorise à assister à l'exécution. La chaise est également là, les courroies défaites, les bras prêts à recevoir le supplicié. Les gardes qui accompagnent le directeur avancent, mais Sacco les arrête. — J'irai moi-même, messieurs ! En effet, il s'installe, sans l'aide de personne, sur la chaise et crie, en italien : «Viva l'anarchia !» Il regarde tous ceux qui sont là et lance de nouveau, cette fois-ci en anglais : «Vive l'anarchie !» Le bourreau l'attache et lui fixe les courroies sur la tête. Sacco lance son dernier cri, de nouveau en italien : «Mamma !» La manette qui commande le système électrique de la chaise s'abaisse, le corps du condamné est secoué de soubresauts et il s'écroule, mort. Il est un peu plus de minuit quand Vanzetti entre à son tour dans la chambre. Il sait que son infortuné compagnon est mort dignement et lui aussi veut affronter la mort sereinement. Il prend place sur la chaise, se laisse attacher par le bourreau et placer le casque sur la tête. «Je pardonne à ceux qui m'ont fait du mal», dit-il. Ce seront ses dernières paroles. Le bourreau abaisse la manette et Vanzetti est foudroyé. Dehors, la rue gronde. Aux Etats-Unis, des émeutes éclatent un peu partout. En Europe, où la nouvelle de l'exécution est arrivée, dans le monde entier, les ambassades et les consulats américains sont pris d'assaut (à suivre...)