Craintes n Les affrontements avec Fatah El-Islam font craindre le pire. La guerre qui a déchiré le pays dans les années 1970 et 1980 a commencé par des combats avec des groupes palestiniens. Après quinze ans d'une guerre civile particulièrement meurtrière, les factions libanaises signent un accord de paix en Arabie saoudite en 1989. Le pays panse ses blessures et s'attelle à redevenir la «petite Suisse du monde arabe». Même la présence de forces étrangères (israéliennes et syriennes) n'a pas empêché les Libanais de tourner la page et de regarder résolument vers le futur. Jusqu'à cette fatidique journée de la Saint-Valentin de l'année 2004, quand une voiture piégée explose au centre de Beyrouth, emportant l'ancien Premier ministre Rafik Hariri, un farouche opposant à la présence syrienne. Un doigt accusateur est vite pointé vers la Syrie qui retire ses troupes dans la précipitation. Le pays du cèdre retrouve ainsi la plénitude de sa souveraineté puisque, entre-temps, l'armée israélienne avait dû évacuer le nord du pays sous les coups de boutoir de la résistance menée par le Hezbollah. Simultanément, il renoue avec les vieux démons de la guerre civile. Sur fond d'enquête internationale sur l'assassinat de Hariri, les attentats à la voiture piégée se multiplient. En juillet-août de l'année passée, suite à l'enlèvement d'un de ses soldats, l'armée israélienne tente de régler son compte au Hezbollah qui lui a infligé, quelques années plus tôt, l'un des rares revers de son histoire. D'intenses bombardements aériens se soldent par des centaines de morts parmi les civils, sous le regard de la communauté internationale qui a attendu un mois pour agir. Tsahal se retire et le Hezbollah de Hassan Nasrallah sort encore une fois vainqueur. Mais l'infrastructure de base du pays a subi de sérieux dégâts dont elle porte encore les stigmates. L'effort de la reconstruction n'est pas entrepris que les voitures piégées au centre de la capitale reprennent. Le dernier attentat en date a visé un député du parti majoritaire fondé par le fils de Hariri. Parallèlement, le nord du pays, jusque-là épargné par l'agitation, s'embrase. Un groupe d'activistes palestiniens, répondant au nom de Fatah El-Islam et retranché dans un camp de réfugié, tient tête à l'armée régulière libanaise. Celle-ci n'hésite pas à user de l'artillerie lourde et ses bombardements intensifs font des centaines de victimes. Un épisode qui fait redouter le pire d'autant que la guerre civile, qui a ensanglanté le pays une quinzaine d'années durant, avait commencé par des affrontements avec des groupes palestiniens dans des camps de réfugiés. Les efforts de paix se poursuivent, mais les derniers développements, notamment sur le dossier de l'affaire Hariri avec l'institution d'une commission d'enquête des Nations unies (une option loin de faire l'unanimité parmi la classe politique libanaise), font dire aux observateurs que le pays du cèdre court un risque réel d'implosion.