Résumé de la 2e partie n Las de son fils cadet, le vieux père lui donna de l'argent et lui dit d'aller de par le monde, lui interdisant toutefois de révéler à quiconque son identité. Quand vint le jour, le jeune homme empocha l'argent et prit la route en se disant : «Si seulement j'avais peur ! si seulement je frissonnais !» Arrive un homme qui entend les paroles que le garçon se disait à lui-même. Un peu plus loin, à un endroit d'où l'on apercevait des gibets, il lui dit : — Tu vois cet arbre ? Il y en a sept qui s'y sont mariés avec la fille du cordier et qui maintenant prennent des leçons de vol. Assieds-toi là et attends que tombe la nuit. Tu sauras ce que c'est frissonner. — Si c'est aussi facile que ça, répondit le garçon, c'est comme si c'était déjà fait. Si j'apprends si vite à frissonner, je te donnerai tout mon argent. Tu n'as qu'à revenir ici demain matin. Le jeune homme s'installa sous la potence et attendit que vînt le soir. Et comme il eut froid, il alluma du feu. A minuit le vent était devenu si glacial que, malgré le feu, il ne parvenait pas à se réchauffer. Et les pendus s'entrechoquaient en s'agitant de-ci, de-là. Il pensa : «Moi, ici, près du feu, je gèle. Comme ils doivent avoir froid et frissonner, ceux qui sont là-haut !» Et, comme il les prenait en pitié, il appliqua l'échelle contre le gibet, l'escalada, décrocha les pendus les uns après les autres et les descendit tous les sept. Il attisa le feu, souffla sur les braises et disposa les pendus tout autour pour les réchauffer. Comme ils ne bougeaient pas et que les flammes venaient lécher leurs vêtements, il dit : — Faites donc attention ! Sinon je vais vous rependre là-haut ! Les morts, cependant, n'entendaient rien, se taisaient et laissaient brûler leurs loques. Le garçon finit par se mettre en colère. — Si vous ne faites pas attention, dit-il, je n'y puis rien ! je n'ai pas envie de brûler avec vous. Et, l'un après l'autre, il les raccrocha au gibet. Il se coucha près du feu et s'endormit. Le lendemain, l'homme s'en vint et lui réclama les cinquante talents : — Alors, sais-tu maintenant ce que c'est que d'avoir le frisson ? lui dit-il. — Non, répondit le garçon. D'où le saurais-je ? Ceux qui sont là-haut n'ont pas ouvert la bouche, et ils sont si bêtes qu'ils ont laissé brûler les quelques hardes qu'ils ont sur le dos. L'homme comprit qu'il n'obtiendrait pas d'argent ce jour-là et s'en alla en disant : «Je n'ai jamais vu un être comme celui-là !» Le jeune homme reprit également sa route et se dit à nouveau, parlant à haute voix . — Ah ! si seulement j'avais peur ! Si seulement je savais frissonner ! Un cocher qui marchait derrière lui l'entendit et demanda : — Qui es-tu ? (à suivre...)