Résumé de la 1re partie n M. Sainte-Croix est surpris par le fait étrange qui se passe dans sa pharmacie : boîtes et bocaux se déplacent pour se briser sur le sol. Est-ce que c'est la maison qui se met de guingois ? ?a, c'est plus fort que de jouer au bouchon ! M. Sainte-Croix remet en place les bocaux qui restent. De temps en temps, il jette vers eux un regard soupçonneux. L'un d'entre eux, le plus gros, est au fond d'une sorte de niche assez profonde. — Mais je rêve ou quoi ? Qu'est-ce qui se passe ? Le gros bocal, il n'y a pas de doute, s'est avancé hors de sa niche, jusqu'au bord du meuble. Il est déjà en équilibre instable, à moitié dans le vide. Le pharmacien n'a que le temps de l'attraper au voI : déjà, il s'apprêtait à tomber sur le carrelage. Le mardi suivant, les bocaux «dégringoleurs» semblent pris de folie. Ils se mettent à tomber à tout moment. Même un bocal pesant plus de deux kilos et contenant, entre autres, des boules de camphre. Plus fort encore : sous les yeux incrédules de M. Sainte-Croix et de Gertrude, un bocal tombe à terre mais, avant de se fracasser, il décrit une sorte d'arc de cercle autour du meuble et va toucher le sol à plus d'un mètre de l'endroit où il aurait dû aboutir. A présent ce sont différents récipients posés à même le soI qui semblent pris de la danse de Saint-Guy. Ils sautent littéralement en l'air avant de retomber, brisés en mille morceaux. Gertrude, claquant des dents et multipliant les signes de croix, déclare : — Monsieur m'excusera mais je ne comprends rien à toutes ces diableries. Je ne veux plus entrer dans le laboratoire. Si j'étais monsieur j'irais demander au curé de venir jeter un peu d'eau bénite sur la pharmacie ! M. Sainte-Croix, en bon pharmacien libre penseur, se ferait couper les moustaches plutôt que d'aller demander l'aide du curé ! A partir de cette date, les bocaux, les fioles, les flacons de la pharmacie Sainte-Croix semblent pétillants d'initiative. M. Sainte-Croix remarque néanmoins qu'ils ont l'air particulièrement intéressés par la présence de Gertrude. Dorénavant, non contents de tomber à terre, ils tentent des sorties vers la boutique de l'apothicaire. Quand la porte qui donne sur le laboratoire est fermée, toute une foule de pots et de bocaux viennent se fracasser sur le lourd panneau de chêne. M. Sainte-Croix remarque autre chose : — Mais c'est invraisemblable ! Le bocal de boules de camphre que j'ai mis ce matin sur l'étagère se retrouve à présent en haut de la bibliothèque... ! Et le mortier, comment a-t-il fait pour se renverser ? Le lourd mortier de marbre et son pilon doivent peser plus de vingt kilos. A présent, ils sont de travers. Le pharmacien a du mal à les remettre debout. Au village, on commence à jaser : — Les gens disent que la bonne, Gertrude Hamelin, a été envoûtée. Ils disent même que l'envoûteuse serait une autre jeune femme de la commune. Une certaine Annie Bourgnon, âgée de vingt ans. On l'aurait trouvée en train de lire des livres de magie. Telle est la rumeur publique. Qui monte, qui enfle, qui rebondit de maison en maison. Annie Bourgnon, désignée par la voix du peuple comme une sorcière redoutable, voit sa vie empoisonnée. Elle décide de porter plainte pour «diffamation». M. Sainte-Croix, à défaut de curé, reçoit la visite des gendarmes. Et ceux-ci, tout d'abord un peu étonnés, consignent scrupuleusement les faits. Ils interrogent aussi Gertrude qui confirme les dires de son patron. Comme les flacons sauteurs ne se gênent plus, même en présence de témoins, clients ou parents de M. Sainte-Croix, ceux-ci peuvent aussi apporter leur témoignage : L'autre jour, nous étions assis dans la salle à manger. Un litre est arrivé à toute vitesse. Eh bien, vous le croirez si vous le voulez : il y avait un sac de cinq kilos de lactina sur son passage. (à suivre...)