Crise L'opposition géorgienne semblait en passe, samedi, de réussir une révolution de velours contre le pouvoir chancelant du président Edouard Chevardnadzé qui a dénoncé un coup d'Etat. M. Chevardnadzé, 75 ans, a décrété l'état d'urgence pour trente jours. «Nous punirons tous les criminels, nous arrêterons ceux qui ont violé la loi. Je décrète maintenant l'état d'urgence, nous devrons remettre de l'ordre dans le pays», a-t-il déclaré de sa résidence de Krtsanissi, près de Tbilissi, alors que le centre de la capitale était aux mains des manifestants de l'opposition. «Un coup d'Etat a été commis en Géorgie», a déclaré la présidence, semblant reconnaître que le pouvoir avait changé de mains. Le leader de l'opposition radicale, Mikhaïl Saakachvili, a annoncé que la présidente du Parlement sortant, Nino Bour-djanadzé, son alliée au sein de l'opposition, assurait désormais la présidence. «Tant que la situation n'est pas éclaircie» et «conformément à la Constitution», a souligné l'intéressée. Dans la soirée, M. Saakachvili a appelé les ministres à venir s'entretenir avec Mme Bourdjanadzé et annoncé qu'une unité des forces spéciales géorgiennes de l'ouest du pays montait sur Tbilissi pour défendre l'opposition. Cette information n'a pu être confirmée. La foule des manifestants menée par M. Saakachvili, dirigeant en pointe de la protestation engagée depuis les législatives controversées du 2 novembre et qui exigeait la démission de M. Chevardnadzé, a pénétré par la force peu après 17h (13h GMT) au Parlement, où le chef de l'Etat venait d'ouvrir la session de la nouvelle Assemblée. Les protestataires, 50 000 à 100 000, selon les estimations ? la plus grande manifestation à Tbilissi, de mémoire de Géorgien ?, n'ont rencontré pratiquement aucune résistance policière. M. Saakachvili, après avoir lancé un ultimatum en début d'après-midi à M. Chevardnadzé, s'est alors dirigé vers lui en criant : «Démission.» Et le président, l'air éprouvé, a quitté précipitamment la salle avec des gardes du corps, en lançant devant ses partisans réunis : «Je ne quitterai mes fonctions que par la voie constitutionnelle. Je ne partirai pas.» Plus tôt dans la journée, Mikhaïl Saakachvili avait exigé la convocation de nouvelles législatives et une présidentielle anticipée. Dans la soirée, plusieurs centaines de militants de l'opposition sont entrés dans le siège de la présidence, où ils se sont mis d'accord avec des membres de l'administration présidentielle pour assurer la sécurité et éviter toute dégradation.