Procès n Les scandales dans lesquels des soldats américains ont été impliqués en Irak ont souvent fait l'objet d'enquêtes approfondies, qui n'ont pas abouti à de nombreuses condamnations. Lorsque les photos des humiliations infligées à des détenus irakiens par leurs gardiens américains à Abou Ghraïb ont été publiées au printemps 2004, le monde entier a exprimé son horreur. L'année dernière, le président américain George W. Bush a estimé qu'il s'agissait de «la plus grosse erreur» en Irak. Mais après plusieurs enquêtes et des années de procédure judiciaire, seulement onze soldats, ceux qui apparaissaient sur les photos, ont été jugés et condamnés à des peines allant de quelques heures de travaux d'intérêt général à 10 ans de prison. Une poignée de leurs supérieurs ont été réprimandés, et une générale rétrogradée. Le seul officier poursuivi, le colonel Steven Jordan, ancien directeur du centre des interrogatoires de la prison, a été acquitté cette semaine des faits directement liés aux sévices. Il a été réprimandé pour avoir désobéi à un ordre en marge du scandale. L'administration Bush a «longtemps assuré que les sévices d'Abou Ghraïb étaient le fait d'un petit nombre de sociopathes. Il est évident que c'est faux», dénonçait ainsi un éditorial du New York Times cette semaine. Lorsque la vidéo tournée au lendemain de la tuerie de Haditha a été diffusée au printemps 2006, le monde a également fait part de son horreur. Les images montraient des enfants tués d'une balle dans la tête, les récits évoquaient 24 civils abattus par des Marines qui voulaient venger un camarade tué par une bombe artisanale. Les enquêtes de l'armée ont fait preuve de plus de nuance, détaillant la rage, mais aussi la confusion de ces jeunes soldats bloqués dans une zone hostile. Et devant la justice, le dossier s'est encore aminci. Quatre Marines ont été inculpés de meurtre en décembre, dernier mais deux ont été blanchis, un troisième est en passe de l'être, et un enquêteur militaire a examiné cette semaine la validité des preuves contre le dernier, un sergent accusé de 17 meurtres, qui assure avoir suivi les règles d'ouverture du feu après avoir essuyé des tirs depuis des maisons. Quatre gradés ont été inculpés pour ne pas avoir cherché à savoir ce qui s'était passé, mais l'un d'entre eux a déjà été blanchi. Dans certains cas, des soldats auteurs de crimes de guerre ont pourtant été condamnés à de très lourdes peines. Trois soldats accusés du viol et du meurtre d'une adolescente et de sa famille à Mahmoudiyah ont ainsi écopé de la réclusion à perpétuité. Leur leader présumé, Steven Green, risque la peine de mort. Deux soldats qui ont reconnu avoir tué des prisonniers de sang-froid lors d'un raid sur une île du Tigre ont été condamnés à 18 ans de prison. Ils avaient assuré avoir agi sur ordre de leur sergent, mais ce dernier a été acquitté des chefs d'assassinats, et condamné à 10 ans de prison pour «homicide par négligence». Au cours de l'enquête sur ce drame, des soldats ont affirmé que le commandant de l'unité, le colonel Michael Steele, un héros décoré en Somalie, avait ordonné de ne pas prendre de prisonniers. Son discours, ambigu, a été filmé dans le cadre d'un documentaire sur son unité. Il a été réprimandé et réassigné hors d'une zone de combat.