Résumé de la 2e partie n Franjié meurt du sida. Emmanuel recherche le billet que quelques jours plus tôt son ami lui avait donné. Il ne le retrouve plus.... Où est-il passé, qui l'a touché ? se demande-t-il. Micheline ne peut retenir ses larmes. Emmanuel non plus. — Et maintenant, qu'allons-nous faire ? — Nous allons téléphoner à sa sœur à Rab. La meilleure solution serait de le faire incinérer et de lui rapporter les cendres l'été prochain. La sœur de Franjié, quand on lui annonce la nouvelle tragique et les projets d'incinération, répond négativement. Un ami yougoslave des Formentier sert d'interprète : — Elle dit que Franjié, conscient de la gravité de son état, a bien précisé qu'il ne voulait pas être incinéré. Il veut être enterré à côté de son père, au milieu des Vukovitch, à Rab. Les Formentier se mettent en rapport avec les Pompes funèbres. Qui leur disent : — Nous nous chargeons de tout. Cela coûtera quinze mille francs. — Bien, la famille Vukovitch va vous les envoyer. Les formalités, très longues, durent trois mois. Ce n'est qu'alors qu'on procède enfin à la mise en bière et qu'on décide du vol qui doit transporter le cercueil vers Rijeka. Pendant ces trois mois, Emmanuel a régulièrement examiné chaque recoin de la maison en disant : — Je suis certain que le billet de cinq cents francs de Franjié est dans la maison. Mais où ? J'ai tout retourné. Il doit être quelque part... j'ai fouillé cent fois mon portefeuille... Tiens, d'ailleurs, il faut que je prenne de l'argent au distributeur automatique aujourd'hui. Emmanuel prend cinq cents francs au distributeur : deux billets de deux cents et un billet de cent. Il les range soigneusement dans son portefeuille. Comme d'habitude. Ce jour-là, pour le déjeuner, il a rendez-vous avec quelques collègues pour discuter de leur prochain engagement maritime. Tout se passe pour le mieux jusqu'au moment où Emmanuel lance : — L'addition, il faut que je file. A l'instant où le serveur apporte la «petite note», Emmanuel ouvre son portefeuille sans regarder, tout en continuant à discuter avec ses amis. Soudain, il sent une boule de papier chiffonné qui se trouve là, au milieu du portefeuille. — Qu'est-ce que c'est que ça ? «?a», c'est un billet de cinq cents francs, roulé en boule. — Mais d'où il sort, ce billet ? s'exclame Emmanuel. Il n'était pas là ce matin. Il n'était pas là tout à l'heure quand j'ai pris de l'argent au distributeur. — Soudain une idée fulgurante lui vient à l'esprit. Blanc comme un linge, il consulte sa montre : — Quatorze heures quinze ! Non, ce n'est pas possible. Quatorze heures quinze ! Nous sommes mardi. Mon Dieu ! L'avion qui emporte le corps de Franjié est en train de décoller pour Rijeka ! C'est le billet qui avait disparu le jour où il est arrivé chez nous. Est-ce un signe ? Emmanuel, vaincu par l'émotion, se met à pleurer silencieusement. Et pendant de longues minutes il est incapable d'expliquer à ses copains pourquoi le fait de payer l'addition avec un billet de cinq cents francs chiffonné provoque chez lui une telle émotion.