Résumé de la 1re partie n Barbara ne vola pas ce surnom de «fée aux gros yeux». Elle est en effet trop intelligente, instruite, mais surtout, elle fait des broderies fabuleuses. Barbara ne semblait pas indifférente à ce compliment, et elle avait coutume de répondre : — Qui sait ? Peut-être ! peut-être ! Un jour, Elsie lui demanda si elle parlait sérieusement en disant pareille chose, et miss Barbara répéta d'un air malin : — Peut-être, ma chère enfant, peut-être ! Il n'en fallut pas davantage pour exciter la curiosité d'Elsie ; elle ne croyait plus aux fées, car elle était déjà grande, elle avait bien douze ans. Mais elle regrettait fort de n'y plus croire, et il n'eût pas fallu la prier beaucoup pour qu'elle y crût encore. Le fait est que miss Barbara avait d'étranges habitudes. Elle ne mangeait presque rien et ne dormait presque pas. On n'était même pas bien certain qu'elle dormît, car on n'avait jamais vu son lit défait. Elle disait qu'elle le refaisait elle-même chaque jour, de grand matin, en s'éveillant, parce qu'elle ne pouvait dormir que dans un lit dressé à sa guise. Le soir, aussitôt qu'Elsie quittait le salon en compagnie de sa bonne qui couchait auprès d'elle, miss Barbara se retirait avec empressement dans le pavillon qu'elle avait choisi et demandé pour logement, et on assurait qu'on y voyait de la lumière jusqu'au jour. On prétendait même que, la nuit, elle se promenait avec une petite lanterne en parlant tout haut avec des êtres invisibles. La bonne d'Elsie en disait tant, qu'un beau soir, Elsie éprouva un irrésistible désir de savoir ce qui se passait chez sa gouvernante et de surprendre les mystères du pavillon. Mais comment oser aller la nuit dans un pareil endroit ? Il fallait faire au moins deux cents pas à travers un massif de lilas que couvrait un grand cèdre, suivre sous ce double ombrage une allée étroite, sinueuse et toute noire ! — Jamais, pensa Elsie, je n'aurai ce courage-là. Les sots propos des bonnes l'avaient rendue peureuse. Aussi ne s'y hasarda-t-elle pas. Mais elle se risqua pourtant le lendemain à questionner Barbara sur l'emploi de ses longues veillées. — Je m'occupe, répondit tranquillement la fée aux gros yeux. Ma journée entière vous est consacrée ; le soir m'appartient. Je l'emploie à travailler à mon compte. — Vous ne savez donc pas tout, que vous étudiez toujours ? — Plus on étudie, mieux on voit qu'on ne sait rien encore. — Mais qu'est-ce que vous étudiez donc tant ? Le latin ? le grec ? — Je sais le grec et le latin. C'est autre chose qui m'occupe. (à suivre...)