Précaution n Les cafetiers obligent les joueurs à commander des boissons et des pâtisseries à l'entame de chaque partie. Le jeu, que ce soit les dominos, les cartes ou autres, se déroule généralement dans les cafés maures. Le principe est simple : tout au long de la partie, les joueurs consomment soit du café, du thé, des gâteaux, des amuse-gueules, des limonades… Les perdants payent l'ensemble des consommations et les gagnants peuvent se targuer d'avoir pris leur boisson favorite sans avoir déboursé un sou. Ils pourront taquiner leurs malheureux adversaires durant le reste de la soirée. On joue pratiquement pour des prunes, pour reprendre l'expression consacrée. L'enjeu total d'une partie ne dépasse pas, généralement, quelques dizaines de dinars. Le véritable enjeu, c'est le moment de plaisir passé entre amis et parfois, le défi de battre l'adversaire, sans plus. C'est ce qui explique, peut-être, l'engouement qu'affichent les algériens pour les jeux durant le mois sacré. Comme quoi, il ne s'agit nullement de jeu de hasard où les adeptes sont attirés par l'appât du gain. «Il s'agit d'autre chose. Nous jouons pour le plaisir. Il nous arrive même de payer les consommations même lorsque nous sommes vainqueurs», nous dit un quinquagénaire rencontré au centre d'Alger. Pour défendre leurs intérêts et rentabiliser leur affaire – ce qui est somme toute légitime –, les cafetiers n'hésitent pas à obliger les joueurs à consommer. Il y a, en effet, ceux qui, par avarice, prennent un café pour dix dinars et vous occupent une table durant toute la soirée. Ce qui, en aucun cas, ne peut arranger le cafetier. Il y en a même qui contraignent les clients à renouveler leurs commandes à chaque nouvelle partie. Et les petits bouts de papier qui servent au pointage des scores sont là pour faire foi, en cas de litige entre le gérant et les joueurs sur le nombre de parties jouées. Une partie de dominos se joue à quatre (deux équipes de deux personnes chacune), tout comme la belote. Pour la «ronda», jeu de quarante cartes d'origine espagnole, cinq joueurs sont nécessaires. Quatre «compétiteurs» répartis en deux duos adverses et un pointeur qui coche sur un bout de papier le score de chacune des équipes, histoire d'éviter tout malentendu en fin de partie. Autour des joueurs, il y a les spectateurs ou les curieux. En somme, une ambiance particulière envahit les cafés maures durant le ramadan. Il arrive parfois que les deux amis qui formaient un duo dans une partie qu'ils ont perdue s'affrontent entre eux en tête à tête (ras -ras), comme disent-ils, pour déterminer celui qui payera seul l'ensemble de la note, donnant lieu à un suspense attrayant au grand bonheur des curieux… Le jeu ne se fait, cependant, pas que dans les cafés maures. Des jeunes, généralement des bandes de copains, s'arrangent pour se retrouver dans la soirée en plein air dans leur quartier, sous un lampadaire, non pas autour d'une table mais autour d'une caisse de bois ou tout autre objet de forme cubique et s'adonnent à d'interminables parties de dominos ou de belote. Pour tout enjeu, une bouteille de limonade que le perdant payera...