Constat n L'Amérique est aujourd'hui dans une situation sans précédent. Des millions de jeunes Américains n'ont connu personne d'autre qu'un Bush ou un Clinton à la Maison-Blanche. Si Hillary Clinton devient présidente le pays sera gouvernée sans discontinuer pendant 24 ans, voire 28 ans par des membres de deux familles. Le président Bill Clinton, au pouvoir pendant huit ans, a succédé à quatre ans de présidence à George Bush père, avant de céder la place au fils de celui-ci, George Bush, président depuis sept ans. Alors que, pour la première fois depuis 1928, l'élection présidentielle américaine n'a jamais été aussi ouverte, sans vice-président candidat à la succession, la domination de la vie politique par deux familles fait déjà grincer des dents. Plusieurs des candidats actuels à la présidence proviennent de familles politiques : le sénateur démocrate Christopher Dodd est fils de sénateur, le républicain Mitt Romney, ancien gouverneur du Massachusetts, est le fils d'un ancien gouverneur du Michigan, en son temps candidat malheureux à la présidence. Mais l'étonnante et irrésistible ascension de la candidate démocrate illustre également les arcanes de la politique américaine. «C'est lié aux coûts astronomiques des campagnes électorales américaines, au besoin pour les candidats d'avoir un nom facilement reconnaissable dès les premiers sondages afin de pouvoir collecter des fonds et à la complexité de mettre sur pied une campagne», analyse Linda Fowler, professeur de sciences politiques à Dartmouth College. «C'est un cercle vicieux. Les donateurs ne contribuent pas à une campagne s'ils pensent que vous ne pouvez pas gagner et une des façons pour les candidats de démontrer leur crédibilité, c'est de prouver que les électeurs les connaissent et les soutiennent», dit-elle. Mme Clinton écrase dans les sondages ses rivaux démocrates et dispose d'un trésor de campagne amassé avec l'aide de son époux, l'ex-président Bill Clinton dont la moindre participation à un événement de campagne génère des contributions phénoménales ainsi que d'un réseau ancien et puissant de donateurs. Sans cette dynamique, relèvent les experts, Hillary Clinton n'aurait pas été une candidate viable au Sénat en 2000, aujourd'hui favorite dans la course à la Maison-Blanche. De même pour George Bush, mis en selle par les réseaux paternels dans sa campagne de gouverneur et sa course à la présidence. Interrogée à ce sujet récemment, Mme Clinton a répondu par une pirouette, affirmant : «Je pense que Bill était un bon président.» Avant de se hâter d'ajouter qu' elle était «une candidate à part entière, se présentant seule». Bill Clinton a, pour sa part, renvoyé toute notion de dynastie au temps des rois de France, estimant que «la vraie question serait plutôt : faut-il éliminer Hillary Clinton parce qu'il se trouve qu'elle est mon épouse, si elle est par ailleurs la mieux qualifiée pour la présidence?»