"Incohérences" Les réactions à propos du Recensement général de l?agriculture se succèdent mettant en doute sa fiabilité. Le professeur Slimane Bedrani, directeur de recherche au Centre de recherche en économie appliquée de développement et enseignant à l?Institut national d?agriculture d?El-Harrach, a confié son scepticisme à InfoSoir après la publication partielle des résultats du Recensement général de l?agriculture (RGA). Le professeur récuse le chiffre d?un million d?exploitants agricoles en Algérie. Pour étayer ses propos, il se base sur les données de la Chambre nationale d?agriculture qui n?a délivré jusqu?à présent que 350 000 cartes. «Même si la chambre continue cette opération, elle ne pourrait que doubler le chiffre précédent, ce qui est loin du million d?agriculteurs avancé par le ministère»,dit-il. Le professeur ajoute que la définition du RGA est également faussée car beaucoup de personnes recensées en tant qu?agriculteurs tirent en réalité une partie marginale de leurs revenus de l?agriculture. Notre interlocuteur trouve que l?agriculture algérienne n?a enregistré que peu de performances depuis l?indépendance. Le manque de productivité dans l?agriculture est notamment décrié. Ces contre-performances font que l?agriculture algérienne est très extensive. C?est ce qui ressort aussi si l?on se base sur le critère de l?utilisation des intrants de la production, tels les produits phytosanitaires et les engrais. Le rapport contient d?autres incohérences. A titre d?exemple, pour mettre fin au handicap de la surpopulation rurale, le ministère propose une intensification du transfert des agriculteurs vers les villes, accentuant de ce fait l?exode rural. «La jachère reste encore importante alors que les terres concernées pourraient être exploitées pour la production du fourrage ou des légumineuses", poursuit il. A cela s?ajoute le fait que l?Algérie reste structurellement déficitaire dans la production des produits agricoles de base comme le lait les céréales et les oléagineux, «car la productivité reste faible dans ce domaine». Le chercheur tord aussi le cou à la thèse communément admise selon laquelle l?Etat ne conserverait que peu de terres agricoles. Selon Bedrani, plus de 50 % de la surface agricole utile restent encore la propriété de l?Etat notamment les terres du douçain privé représentées par les exploitations agricoles communes et individuelles ou les terres en concession. Le chercheur préfère d?ailleurs que l?Etat reste propriétaire car en cas de privatisation des terres, il ne serait pas exclu que la rente ne fasse partie des coûts de production, conduisant à la cherté des produits agricoles.