Une mère de famille avait sept fils et une fille. La fille était belle comme une reine. Les fils avaient chacun reçu du ciel une grâce particulière qui était si remarquable qu'elle lui servait de Nom. C'est ainsi que l'aîné, adroit et fort, se nommait : «Tireur-à-l'arc» (Dharib en-nouchab). Le deuxième fils n'avait qu'à frapper le sol de son pied et la terre s'entrouvrait pour lui permettre un refuge souterrain. On l'appelait «Frappeur-du-pied-sur-le-sol-et-il-s'entrouvre». (Dharib el qa'a biredjelihi oua tanhall). Le troisième fils avait l'oreille si fine qu'il était capable de déceler le son le plus discret de la nature. C'était : «Ecouteur-de-rosée» (Sami'a en-neda). Le quatrième fils avait le don de cracher une salive qui parlait à sa place. Il se nommait : «Cracheur-à-terre-et-sa-salive-parle» (Baziq bezqa fil ardh oua tahader). Le cinquième fils avait une patience et une légèreté manuelle angéliques qui lui permettaient de démêler les fils les plus ténus laissés par les animaux ayant accroché leurs toisons dans les buissons épineux, ce qui lui avait valu le nom de : «Fileur-de-fils-de-soie-accrochés-au-cédrat» (Salik el harir min eç-cedrat). Le sixième fils était doué pour ouvrir les serrures. Il avait pour nom : «Toucheur-de-serrure-et-ses-accessoires-s'envolent» (Hatit Iddhou 'ala qoufel oua iatirouhou er-rich). Le septième et dernier fils avait enfin, comme le roi Salomon, le don de se faire obéir par les vents. On l'appelait : «Commandeur-des-vents-et-ils-l'emportent» (Amir 'ala er-riah oua iarfedouhou). Il arriva un jour un grand malheur. La fille unique qui était le joyau de la famille fut enlevée par un ghoule. Ses frères étaient dans la nature lorsque l'enlèvement eut lieu. En arrivant à la maison, ils trouvèrent leur pauvre mère éplorée qui les avertit du rapt et les lança à la recherche de leur sœur. Les jeunes gens, la rage au cœur, se mirent donc à battre toute la contrée. Ils commencèrent par les régions en bordure de la mer. En ordre dispersé, pour aller plus vite, ils se partagèrent l'inspection des rivages, des grottes marines, des vallées et des monts donnant sur l'océan. Au crépuscule, ils se réunirent bien déçus, car tous leurs efforts avaient été vains. Le désespoir commençait à enbrunir leurs yeux. Ils pensèrent alors qu'il serait peut-être bon pour sauver leur sœur avant la nuit — de coordonner leurs grâces particulières et de donner à chacun des frères, étape par étape, l'occasion logique d'exercer le don qu'il avait reçu du ciel. Il s'agissait d'abord de définir une direction de recherche pour sortir des errements. Les frères s'adressèrent donc à «Commandeur-des-vents-et-ils-l'emportent». Le jeune homme, très recueilli, se mit à l'écoute, pria le vent de souffler dans la direction de la chère disparue et de l'emporter près d'elle. Les sept jeunes gens s'engouffrèrent donc sur la trace de Commandeur-des-vents. Ils arrivèrent ainsi à la maison du ghoule. Elle était située sur la montagne. Ils virent là des vaches et des moutons qui paissaient en liberté. Près de la maison, se trouvaient deux grands bassins pleins d'eau et deux poutres de fer de centaines de mètres de longueur. La maison n'avait qu'une porte d'entrée. Elle était verrouillée, car la nuit commençait à les envelopper. Leur cœur se serra en pensant que leur sœur était prisonnière derrière ces grands murs. (à suivre...)