Conséquences n La situation s'est dangereusement compliquée avec la décision du chef de l'Etat de décréter l'état d'urgence. Au lendemain de la proclamation de l'état d'urgence par le président Musharraf, le calme semblait prévaloir ce dimanche matin à Islamabad où les transports privés fonctionnaient librement hormis dans la zone qui abrite les locaux de la Cour suprême, de la présidence et du Parlement. L'ex-Premier ministre pakistanaise Benazir Bhutto, qui négociait avec le général Musharraf pour un partage du pouvoir, est revenue, hier, samedi, à Karachi en provenance de Dubaï. Elle a dénoncé une régression vers un régime «dictatorial». Un autre ancien Premier ministre en exil, Nawaz Sharif, a réclamé la démission de son ennemi Musharraf. L'instauration de l'état d'urgence compromet les élections législatives de janvier 2008. Elle met également à mal les pourparlers engagés pour le partage du pouvoir. Washington et Londres soutenaient ce processus qui devait voir le général Musharraf devenir un président civil après avoir renoncé à son poste de chef des armées et Mme Bhutto diriger le gouvernement. Le terrorisme a atteint son apogée au Pakistan et le gouvernement est paralysé par la Cour suprême, a estimé le président pakistanais dans un discours à la nation pour justifier l'état d'urgence instauré quelques heures auparavant. «L'inaction à ce stade est un suicide pour le Pakistan et je ne peux laisser ce pays se suicider», a déclaré le général-président Pervez Musharraf qui s'est posé en garant de l'intégrité nationale lors de cette adresse télévisée à la nation. Il a également sollicité la compréhension de ses alliés occidentaux envers sa décision accueillie avec préoccupation ou déception à travers le monde. Les Etats-Unis, qui ont fait du général Musharraf leur allié-clé dans leur guerre contre le terrorisme, ont jugé la mesure d'exception «très décevante». Parmi les périls qui menaceraient la nation, Musharraf a cité la vague sans précédent d'attentats-suicide, qui ont fait 420 morts depuis juillet, parmi lesquels 139 tués à Karachi, dans le sud du pays, le 18 octobre dernier. Visant la Cour suprême, le général Musharraf s'en est longuement pris au «militantisme judiciaire». «Tous les fonctionnaires sont insultés par les tribunaux, et c'est pour cela qu'ils ne peuvent prendre aucune mesure», a-t-il ajouté. L'ordre présidentiel instaurant l'état d'urgence affirme qu'une partie du pouvoir judiciaire interfère avec l'exécutif. La police et l'armée ont encerclé le siège de la plus haute juridiction du pays à Islamabad, tandis que le gouvernement s'est empressé de nommer un nouveau président à la tête de la Cour suprême qui devait rendre dans les prochains jours sa décision sur la validité de la réélection du Musharraf à la présidentielle du 6 octobre. Les autorités ont également procédé à une vague d'arrestations. La Constitution a été suspendue et une série de restrictions a été imposée aux médias. Toute publication diffamant le président, son gouvernement ou les forces armées est désormais proscrite. Les communications téléphoniques mobiles et terrestres ont également été coupées et les retransmissions de certaines télévisions privées interrompues. Certaines ont été rétablies depuis.