Chiffres n Le CPMC du CHU Mustapha reçoit, selon un médecin, entre 10 et 15 nouveaux malades cancéreux par semaine, soit près de 150 nouveaux cas par an dont plus de 140 des fumeurs, soit 80%. Ce médecin, qui a requis l'anonymat, nous révèle que cet hôpital qui reçoit des milliers de malades du centre et de l'intérieur, ne peut supporter cette charge et souffre actuellement de pénurie régulière de médicaments. «Les nouveaux traitements pour la chirurgie sont chers et on n'arrive pas à les avoir correctement». Ce médecin, qui se désole du non-respect des lois sur l'interdiction de fumer, conseille aux parents de surveiller leurs enfants et de leur interdire de fumer, de sensibiliser à large échelle dans les établissements scolaires et de demander aux bureaux de tabac de ne plus vendre de cigarettes aux enfants et mineurs. De son côté, le professeur Salim Nafti, chef du service de pneumologie de la clinique des maladies respiratoires au CHU Mustapha d'Alger, considère l'action de fumer comme une véritable toxicomanie légale et encouragée puisqu'on commence à fumer par simple imitation et on continue par addiction. «Cette toxicomanie est non seulement légale mais encouragée par une promotion agressive des fabricants qui conduit à des pathologies graves souvent au-delà de toute thérapeutique», a-t-il expliqué. Il déplore le fait que certains praticiens n'incitent pas fréquemment les fumeurs à un sevrage tabagique qui est un bon processus de changement de comportement qui aidera le fumeur par différents stades de motivation à l'arrêt. Il conseille à chaque soignant d'encourager le fumeur à arrêter par des conseils clairs, fort personnalisés car il a affaire à des fumeurs réguliers, d'autres occasionnels, certains motivés pour arrêter et d'autres non. Le Pr Nafti dénonce en outre la demande des étrangers à l'investissement dans le tabac. «Il faut que l'Etat sévisse ! On laisse les étrangers investir au détriment de la santé des Algériens ... C'est inconcevable ! Nous voulons influer sur les pouvoirs publics pour que tous les produits toxiques (alcool, tabac...) n'entrent pas chez nous. Même la contrebande devrait être sévèrement jugée», a-t-il appelé. Les professionnels de la santé appellent à plus d'efforts en matière de lutte contre la cigarette et «la mafia» qui la commercialise et l'introduit chez nous illicitement ou par le biais de publicités mensongères. La prise en charge à 100% d'un cancéreux du poumon selon le Pr Bouzid, chef de service d'oncologie médicale au Centre Pierre-et-Marie-Curie (CPMC) d'Alger, coûterait 250 millions de centimes par cas qui finit généralement par mourir. «Un malade sur deux meurt de cancer la première année et un malade sur vingt survit à son cancer de cinq ans», nous a-t-il déclaré. A signaler enfin que les cancers du poumon sont en constante progression dans le monde avec 1,2 million de nouveaux cas diagnostiqués annuellement. Il est la première cause de mortalité chez l'homme à cause du tabac pour une proportion de 85%. Et plus on commence jeune à fumer, plus le risque est grand. A l'arrêt, le risque de survenue d'un cancer du poumon diminue régulièrement avec le temps.