Pendant toute la Seconde Guerre mondiale, HitIer et les forces nazies organisent le pillage systématique des œuvres d'art dans tous les pays de l'Europe occupée. Ils se saisissent des œuvres appartenant aux collections juives, mais n'hésitent pas non plus à s'emparer d'œuvres majeures, des trésors des musées nationaux. Les voIs sont si abondants que se pose très bientôt le problème du stockage. Munich, capitale de la Bavière et berceau du national-socialisme, semble être tout d'abord le lieu idéal pour regrouper les objets dérobés. On les accumule au Fuhrerbau. Puis la place manque. On trouve un autre dépôt : le château de Thürntal, près de Kremsmünster. On remplit ensuite le monastère de Hohenfurth, et enfin on transforme en gigantesque entrepôt les différentes pièces du fameux château de Neuschwanstein, près de Füssen, le rêve de Louis II de Bavière. Un peu partout, les tableaux sont enfermés dans des caisses et déposés sur des châssis de bois. L'arrivée des œuvres forme un flot continu pendant plus de deux ans. 1 732 tableaux, des ferronneries, des objets d'art. L'orfèvrerie admirable de la collection Rothschild, l'argenterie David-Weill... Les Trois Grâces, célèbre peinture de Rubens... Au mois d'octobre, les comptes du château signalent que 21 903 collections juives ont été mises en dépôt dans le palais baroque... La place manque. Le monastère d'Hohenfurth, qui jusqu'alors ne recevait que des statues et des ouvrages de ferronnerie, commence, lui aussi, à accueillir des peintures admirables. HitIer, devant la recrudescence des bombardements aIliés, prend conscience du danger qu'il y a à garder tant de merveilles à portée des bombes. Il a dans l'idée de créer en Autriche, à Linz sa région natale, un musée admirable, à sa propre gIoire, dont les trésors seront ceux des collections dérobées un peu partout. Mais pour l'instant, il s'agit de mettre toutes ces splendeurs à l'abri des bombes. HitIer fait donc transporter au fond de la mine de Merkeers, à cent kilomètres à l'ouest de Weimar, les premières œuvres, ainsi que cent tonnes d'or, qui représentent la réserve bancaire du parti nazi. Suivent aussi les trésors nationaux, qui viennent des collections allemandes de l'empereur Frédéric II le Grand. Cependant, il existe en Autriche une ancienne mine de sel. Les mineurs, dans une ferveur naïve, ont sculpté au fond de la mine une chapelle en mémoire du chancelier Engelbert Dolfuss, chrétien social assassiné par les nazis en 1934. Cette mine existe depuis plus de deux mille ans, et ce sont quelques familles qui s'occupent de son exploitation. Ces gens vivent en petite communauté, parIent un patois qui remonte au Moyen Âge et, à force de se marier entre eux, ont créé chez leurs descendants un type physique proche du nanisme. Ce sont les nains sans Blanche-Neige ! Un des responsables du musée de Vienne, visitant la mine, est frappé par l'aspect de cette chapelle commémorative : les statuettes, les tissus de l'autel, les bouquets de fleurs des champs restent dans un état de conservation admirable. Cela est dû à l'hygrométrie constante et à la température, qui varie entre 4° l'hiver et 8° l'été. Aussitôt, il comprend que voilà le lieu de stockage idéal pour les œuvres d'art, et il y fait transporter, entre autres, des boiseries admirables et fragiles du château de Schoenbrunn. (à suivre...)