Les festivités de Yannayer donnaient lieu, dans certaines régions, à des jeux, peut-être même des carnavals, mais ceux-ci étaient, en général, transférés sur la fête musulmane de l'Achoura. Le seul carnaval qui nous soit parvenu, aujourd'hui, est le carnaval des Beni Snous, naguère disparu, puis repris ces dernières années par des associations culturelles de la région de Tlemcen. Dans sa version originelle, le carnaval qui a lieu la nuit de l'incidence, comprend quatre personnages masqués : Cheikh Boumennani, vêtu de haillons et portant un cornet en fer qui amplifie ses cris, deux autres personnages habillés comme lui, mais sans cornet, et un quatrième qui représente un âne. Le groupe sort, suivi d'un cortège de jeunes gens. On chante, on danse et on pousse un cri : «ayrad !», vieux mot berbère qui signifie lion et qui n'est plus utilisé dans les parlers locaux. On frappe aux portes des maisons et on collecte des aliments : beignets, crêpes, pain, figues sèches que l'on mange à la fin de la cérémonie… Les talebs des écoles coraniques faisaient également des quêtes aux profit de leurs maîtres : les étudiants se regroupaient et partaient avec des ânes chargés de sacs pour recueillir des denrées alimentaires. Le cortège était dirigé par un taleb à qui on donnait le nom de Boubennani. Ce dernier qui portait un masque taillé dans une citrouille, allait dans les villages, avec ses compagnons qui scandaient son nom. On entrait dans les maisons et Boubennani s'asseyait dans les cours, refusant de partir, jusqu'à ce qu'on lui donne de la farine, de l'huile et des fruits secs. Si la maîtresse répond à sa demande, sa maison sera bénie, sinon le personnage se lève et maudit la maison et ses habitants.