Les Algériens dont le pays est doté par Dieu d'une côte immense et riche, sont privés de poisson frais. Seuls les nantis peuvent se permettre le luxe de consommer ce produit aux vertus nutritives connues de tous. Chacun avance une explication à cette anomalie, mais personne n'arrive apparemment à trouver une solution. Face à l'inaccessibilité des ménages aux produits frais, l'option du surgelé et du congelé s'impose de facto comme une dernière solution. Le fait est indéniable. Les ménages algériens n'ont pas accès aux produits de la mer de préférence frais, en raison des coûts exorbitants pratiqués par les pêcheurs et tous les intervenants dans le processus de mise sur le marché du poisson. De leur côté, les pêcheurs mettent en avant les mille et une contraintes auxquelles ils font face. Il est notamment question des coûts élevés des frais d'entretien de leurs outils de travail, mais aussi et surtout des énormes charges fiscales dont ils doivent systématiquement s'acquitter. Du coup, les pêcheurs affirment que ces charges fiscales, ou «taxes forfaitaires», constituent un boulet qu'ils traînent et dont il est quasiment impossible de se défaire. Mais face aux complaintes des «hommes de la mer», pourquoi les ménages doivent-ils payer ce que l'Etat doit accomplir à leur place ? Car il est inutile de rappeler que le rôle des pouvoirs publics est justement de faire en sorte de permettre un accès plus direct et moins contraignant des populations aux produits de la mer. Au moment où les côtes du littoral regorgent de diverses sortes de poisson, ce sont les populations des zones côtières qui ont le plus de difficultés d'accès aux produits de la mer. Et c'est le ministre de la pêche et des ressources halieutiques, lui-même, qui a fait état dernièrement de ce paradoxe typiquement algérien. Smaïl Mimoun, qui inaugurait le 9 juillet la 1re édition de la Fête de la sardine de la wilaya de Boumerdès, a reconnu que les populations du littoral ne bénéficient pas du ratio qui devrait être le leur en matière de consommation de poissons. La raison ? Elle est toute simple aux yeux du ministre : l'augmentation des prix du poisson n'est point due à une baisse de la production, mais au fait qu'une grande partie de la production des zones côtières est destinée aux régions intérieures qui, paradoxalement, n'en veulent pas. Résultat : les gens de l'intérieur du pays achètent le poisson à un moindre coût, au grand dam de leurs concitoyens du littoral. La cause, selon M. Mimoun, réside dans le fait que les habitudes et/ou les préférences culinaires ne sont pas identiques. Aussi, explique le ministre, l'offre étant inférieure à la demande le long du littoral, les prix s'envolent de fait, contrairement à d'autres régions. Cet état de fait a été qualifié par M. Mimoun de «singulier» du fait qu'il n'existerait nulle part ailleurs au monde pareille situation. A savoir qu'il y a une forte tension sur les produits frais de la mer. Du coup, le ministre préconise une diversification de la production halieutique pour voir, peut-être, les prix enfin revenir à de meilleures dispositions. Cependant et dans cette attente, les ménages se rabattent sur le surgelé et/ou le congelé faute de mieux. Ont-ils réellement le choix face à l'envolée des prix des produits frais que l'Etat tente de juguler en préconisant la modernisation des outils de pêche ? Lors de l'ouverture du Sempa-2006, Smaïl Mimoun avait indiqué que la «seule alternative» qui se présentait, c'était d'augmenter la production et développer l'aquaculture de façon à faire face «à la demande constante de la population». Insistant sur le fait qu'il n'y a jamais eu baisse de la production, ce qui aurait expliqué la flambée des prix, M. Mimoun a tenu à reconnaître, toutefois, que le potentiel «pêchable» dans notre pays, estimé à 280 000 tonnes, reste «sous-exploité».